Le travail au programme de philosophie

La notion de travail en philosophie

La notion de travail est une des dix-sept notions du programme de philosophie en terminale.

Je vais d’abord faire un point sur la manière dont on peut définir cette notion en la distinguant d’autres notions proches ou opposées. Puis, je vais passer en revue quelques grandes questions possibles sur le travail en philosophie en montrant comment on pourrait y répondre à l’aide d’auteurs classiques.

On peut définir le travail en philosophie comme l’ensemble des activités effectuées par l’homme pour satisfaire ses besoins et transformer le monde qui l’entoure. Le travail est productif et il possède une fin extérieure à lui-même contrairement au jeu, par exemple, qui a sa fin en lui-même c’est-à-dire que lorsque l’on joue on joue pour jouer et pas pour obtenir  quelque chose d’autre. Si vous jouez pour obtenir quelque chose d’autre alors cela devient un travail. Lorsque l’on travaille on vise un résultat utile pour nous et/ou pour les autres.

Par exemple, l’agriculteur transforme la nature pour produire de la nourriture et gagner sa vie, l’architecte construit des bâtiments pour que nous puissions nous loger, l’enseignant transforme ses élèves pour les rendre meilleurs dans une matière, plus avisés, plus cultivés.

Ce que l’on appelle un métier c’est la forme sociale et réglementée du travail.

On oppose souvent le travail et le loisir car le travail est souvent considéré comme une activité subie que l’on fait par nécessité c’est-à-dire parce que nous devons satisfaire nos besoins (gagner de quoi vivre).

Au contraire, le loisir qui vient  du terme grec Skholè désigne une activité libre. Dans l’antiquité c’est ce qu’un citoyen pouvait faire car il n’était pas contraint de travailler pour vivre. Aujourd’hui, le loisir désigne plus généralement le temps libre qu’un individu peut consacrer à des occupations personnelles qui relèvent du divertissement, de la culture ou encore du délassement.

Voilà pour les définitions, j’en profite pour vous rappeler que si vous voulez apprendre à faire une dissertation ou une explication de texte pas à pas, vous pouvez télécharger tous mes conseils de méthodes via le lien juste en dessous de cette article. Vous retrouverez notamment dans cet ebook  gratuit toutes les définitions à bien connaître pour analyser finement un sujet de dissertation.

Bien, à présent, quels sont les grands problèmes philosophiques qui peuvent être posés sur la question du travail en philosophie ? Je vais vous en donner quelques uns parmi les plus importants avec quelques réponses classiques.

– Premier sujet : « Sommes-nous condamnés à travailler ? »

Vous voyez qu’il y a dans cet intitulé l’idée que le travail serait une condamnation donc à la fois quelque chose que l’on n’a pas choisi et quelque chose de vraiment pénible. Peut-on alors dire que le travail est une punition ?

Une fois n’est pas coutume, je vais utiliser essentiellement sur ce sujet un auteur vraiment centrale sur la question du travail j’ai nommé Marx. Marx, philosophe allemand du 19e siècle, a notamment écrit le Capital. Dans ses Écrits économiques, il décrit ce qui est, selon lui, un travail réellement humain.

« Supposons que nous produisions comme des êtres humains : chacun de nous s’affirmerait doublement dans sa production, soi-même et l’autre.

1. Dans ma production, je réaliserais mon individualité, ma particularité : j’éprouverais, en travaillant, la jouissance d’une manifestation individuelle de ma vie, et dans la contemplation de l’objet, j’aurais la joie individuelle de reconnaître ma personnalité comme une puissance réelle, concrètement saisissable et échappant à tout doute.

2. Dans ta jouissance ou ton emploi de mon produit, j’aurais la joie spirituelle de satisfaire par mon travail un besoin humain, de réaliser la nature humaine et de fournir, au besoin d’un autre, l’objet de sa nécessité. »

Pour Marx, le travail permet donc à l’homme en affrontant la dure résistance des choses de prendre conscience de ce qu’il est et de ce qu’il peut. En travaillant, il développe ses capacités et prend conscience de ce qu’il est au travers des produits de son travail. Il tire du résultat de son travail à la fois fierté et satisfaction et ce, d’autant plus qu’en travaillant, il aide à satisfaire les besoins des autres et obtient ainsi la reconnaissance de ses semblables.

En ce sens, le travail en philosophie n’est pas une punition, mais plutôt un bienfait.

Pourtant, ça n’est pas le cas, selon lui, de tous les types de travail. Il montre ainsi dans les Manuscrits de 1844, combien le travail à la chaîne aliène l’homme.

Selon lui, l’homme est mutilé par la division des tâches excessive c’est-à-dire quand il est amené à effectuer dans son travail un très petit nombre de tâches ou de mouvements de manière répétitive et mécanique. Or, cette spécialisation des tâches ne fait que s’accentuer avec les progrès de la mécanisation. On est passé de l’artisanat où un artisan réalise un objet du début à la fin, à la manufacture où le travailleur ne fait plus qu’un ou deux éléments de l’objet final. Cette progression de la division des tâches culmine avec le travail à la chaîne où le travailleur effectue un seul geste répétitif entouré de machines qui amènent à lui l’objet. La tâche est de plus en plus simple, les gestes de plus en plus décomposés et mécaniques. L’homme est alors intégré à la machine et il perd ici son humanité. C’est alors que Marx parle d’aliénation du travail car alors l’homme devient « autre ». Etre aliéné ou subir une aliénation c’est devenir étranger à soi-même. Pour Marx, dès lors que le travailleur ne peut plus développer et épanouir ses capacités proprement humaines telles que l’imagination, la raison, le libre arbitre, dans son travail, alors il devient une machine. Cette forme de travail rend l’homme tel un automate, il le rend stupide.

– Deuxième sujet : « Peut-on opposer le loisir au travail en philosophie ? »

Chez les grecs, le terme loisir se dit Skholè et désigne la liberté que nous avons de ne pas avoir à assurer notre subsistance. C’est donc un temps où nous n’avons pas à travailler pour assurer la satisfaction de nos besoins et où nous pouvons faire autre chose.

Or, pour un grec, ce autre chose c’est essentiellement se consacrer aux études. D’ailleurs, vous remarquez que Skholè donne école en français et school en anglais. En ce sens, le loisir pour les Grecs ça n’est pas le divertissement ou la distraction comme on peut le définir aujourd’hui.

Selon Aristote, dans l’Éthique à Nicomaque, le loisir permettait la réflexion philosophique et le développement intellectuel. C’est, à ses yeux, l’activité la plus haute et la plus proprement humaine car ainsi l’homme n’est plus comme l’animal soumis à la nécessité de travailler pour subvenir à ses besoins vitaux. Il s’arrache de ces basses préoccupations reliées au corps pour se consacrer aux choses élevées de l’esprit et développer ainsi ses facultés proprement humaines.

On peut alors dire que pour les Grecs travail et loisir s’opposent diamétralement, mais ils ont une conception bien spécifique du loisir et du travail.

A cette première réponse, on pourrait ajouter la thèse du philosophe français Baudrillard qui montre combien dans nos sociétés le loisir tout comme le travail doit être productif.

Marx avait déjà dit que le loisir était en réalité une condition du travail car il est le temps nécessaire pour reprendre des forces et retourner travailler. Il montrait en ce sens que loisir et travail ne s’opposait pas tant que ça.

Baudrillard va un peu plus loin. Selon Baudrillard, dans nos sociétés occidentales, la logique du travail a contaminé le loisir. Nous sommes tellement modelés par l’idée qu’il faut rentabiliser son temps et être productif que même lorsque nous avons des loisirs nous allons chercher rentabiliser notre temps. Il faut que nos loisirs soient bien organisés, efficaces, que nous ne perdions pas notre temps, que nous fassions un maximum de choses.

En ce sens, à ses yeux, le loisir et le travail en philosophie ne s’opposent pas.

– Troisième sujet : « Travailler moins, est-ce vivre mieux ? »

Sujet très intéressant et néanmoins difficile, car, vous le remarquez, il contient une expression : « Vivre mieux ».

L’erreur serait ici de ne pas y prêter attention sous prétexte que ça n’est pas une notion du programme. Mais en faisant cela vous risquez de passer à côté de beaucoup d’idées intéressantes  pour le sujet et encore pire, de manquer le problème du sujet.

Donc, au brouillon, il faut se poser la question : qu’est-ce que l’on peut comprendre par « vivre mieux » ?. Et le but va être d’avoir plusieurs sens différents que vous pourrez traiter et envisager tout au long de  votre devoir.

Par exemple : Vivre mieux cela pourrait signifier vivre plus humainement ou vivre plus heureux ou encore vivre plus libre etc

Si vivre mieux c’est vivre humainement en développant nos facultés proprement humaines, en exerçant notre liberté, notre créativité, en réfléchissant et pas simplement en exécutant alors si l’on a un travail aliénant au sens de Marx, il est évident que travailler moins ce serait vivre mieux.

Mais, le travail quelque soit, par ailleurs, sa forme n’a-t-il pas certains avantages ? N’était-ce pas une victoire pour les femmes en 1965 d’avoir désormais l’autorisation d’exercer une profession sans l’autorisation de leur mari ?

On pourrait dire qu’en ce sens le travail libère parce qu’il permet d’être indépendant. N’est-ce pas vivre mieux que d’être indépendant plutôt que dépendant ?

Par ailleurs, travailler c’est aussi parfois atteindre une forme d’excellence dans son domaine. Nietzsche dans Humain, trop humain, remarque qu’on a beaucoup trop tendance à penser que le grand artiste a un don naturel. En réalité, les grands artistes sont, selon lui, surtout de grands travailleurs,  ils se sont beaucoup exercés et y atteignent ainsi l’excellence. N’est-ce pas là une manière de vivre mieux ?

Voilà pour la présentation de cette notion de travail en philosophie, j’espère qu’elle vous permettra de mieux cerner les grandes questions que vous allez rencontrées sur la notion de travail.

Pour d’autres cours de philosophie vous pouvez cliquez ici et pour découvrir les notions du programme de philosophie en vidéos cliquez ici !

Très bonne journée à vous

Marx

Le travail rend-il heureux ? (Marx)

Bonjour, bienvenue dans cette vidéo d’Apprendre la philosophie, dans cet épisode je vais envisager la réponse de Marx au sujet : « le travail rend-il heureux ?

Marx est un philosophe, historien et économiste allemand du 19e siècle particulièrement connu comme l’auteur du Manifeste du parti communiste qu’il rédige avec Friedrich Engels. Il est également l’auteur d’une oeuvre très riche dont une des pièces centrales est sans doute Le Capital.

Pour Marx le travail n’est pas une mauvaise chose en soi, il reconnait même que c’est quelque chose qui distingue les hommes des animaux. Un travail qui permet à l’humain de développer et d’utiliser ses facultés humaines comme sa raison, son imagination ou son libre arbitre est un travail qui améliore l’homme ou du moins qui lui permet d’être réellement humain.

Le problème vient du type de travail et des conditions de travail qui sont données aux êtres humains. Marx écrit au 19e siècle au moment de la révolution industrielle notamment et il critique le travail à l’usine ou à la chaîne car il s’agit d’un travail qui déshumanise l’homme. Alors le travail rend-il heureux ?

Marx parle d’aliénation du travail

Selon Marx, l’homme est mutilé par la division des tâches excessive c’est-à-dire s’il est amené à effectuer dans son travail un très petit nombre de tâches ou de mouvements de manière répétitive et mécanique. Or, cette spécialisation des tâches ne fait que s’accentuer avec la mécanisation. Nous sommes en effet passés de l’artisanat où un artisan réalise un objet du début à la fin, au modèle de l’usine où le travailleur ne fait plus qu’un ou deux éléments de l’objet final. Cette progression de la division des tâches culmine avec le travail à la chaîne où le travailleur effectue un seul geste répétitif entouré de machines qui amènent à lui l’objet. La tâche est de plus en plus simple, les gestes de plus en plus décomposés et mécaniques. L’homme est alors intégré à la machine et il perd ici son humanité.

C’est alors que Marx parle d’aliénation du travail car alors l’homme devient « autre ». Le terme aliénation est construit à partir du latin alienus qui signifie l’autre ou l’étranger. Alors être aliéné ou subir une aliénation c’est devenir étranger à soi-même. Pour Marx, dès lors que le travailleur ne peut plus développer et épanouir ses capacités proprement humaines telles que l’imagination, la raison, le libre arbitre, dans son travail, alors il devient une machine. Cette forme de travail rend l’homme tel un automate, il le rend stupide. On voit un bon exemple de cette folie que le travail à la chaîne produit dans les Temps modernes de Charlie Chaplin.

Le travailleur est dépossédé du fruit de son travail

Par ailleurs, comme les tâches à effectuer sont de plus en plus standardisées et répétitives, le travailleur ne se sent plus l’auteur de son ouvrage, il perd la satisfaction de son travail car il n’en a fait qu’une infime partie et n’y a pas mis de créativité ou d’habileté particulière. C’est pourquoi Marx dit que l’ouvrier est également dépossédé du fruit de son travail. Il n’en tire plus de fierté d’une part et d’autre part, il n’en est plus le propriétaire. En effet, les propriétaires du résultat de son travail sont ceux qui possèdent les moyens de production c’est-à-dire les machines et le capital.

Le travailleur est alors pour finir exploité car comme son travail est peu qualifié et demande peu d’expertise, il est rémunéré un minimum c’est-à-dire selon Marx, juste assez pour qu’il puisse reconstituer sa force de travail et retourner au travail le lendemain. L’ouvrier touche alors juste assez pour avoir un toit et se nourrir. C’est pourquoi, selon Marx, tout ce qui faisait l’humanité du travailleur disparaît. Il est réduit à l’état animal non seulement pendant son travail qu’il subit mais aussi dans sa vie hors de son travail qui se réduit pour une bonne part à être la reconstitution de sa force de travail.

La valeur d’échange du travail diminue car il requiert de moins en moins de compétence et le produit du travail est tellement morcelé que le travailleur ne peut plus ni y imprimer quoi que ce soit de lui-même, ni s’y reconnaître. Non seulement il ne l’humanise plus mais il l’abrutit. Il n’est plus une manifestation de la vie mais un simple moyen d’existence, un travail forcé que l’on fait uniquement pour gagner sa vie.

Il est évident que dans ces conditions le travailleur ne peut pas tirer son bonheur de son travail, c’est plutôt le contraire, son travail fait son malheur.

Voilà pour cet épisode j’espère qu’il vous aura aidé à comprendre un peu la pensée de Marx sur le travail et à traiter la question : le travail rend-il heureux ? Si vous voulez davantage de contenu sur le thème du travail ou du bonheur, je vous invite à consulter cette page.

Très bonne journée à vous

Episode 13 : Marx : Le travail rend-il heureux ?

dans cet épisode je vais envisager la réponse de Marx au sujet : "le travail rend-il heureux ?

Cliquez ici pour l’écouter sur Spotify ou sur Itunes.

Bonjour, bienvenue dans ce nouveau podcast d’Apprendre la philosophie, dans cet épisode je vais envisager la réponse de Marx au sujet : « le travail rend-il heureux ?

Marx est un philosophe, historien et économiste allemand du 19e siècle particulièrement connu comme l’auteur du Manifeste du parti communiste qu’il rédige avec Friedrich Engels. Il est également l’auteur d’une oeuvre très riche dont une des pièces centrales est sans doute Le Capital.

Pour Marx le travail n’est pas une mauvaise chose en soi, il reconnait même que c’est quelque chose qui distingue les hommes des animaux. Un travail qui permet à l’humain de développer et d’utiliser ses facultés humaines comme sa raison, son imagination ou son libre arbitre est un travail qui améliore l’homme ou du moins qui lui permet d’être réellement humain.

Le problème vient du type de travail et des conditions de travail qui sont données aux êtres humains. Marx écrit au 19e siècle au moment de la révolution industrielle notamment et il critique le travail à l’usine ou à la chaîne car il s’agit d’un travail qui déshumanise l’homme.

Marx parle d’aliénation du travail

Selon Marx, l’homme est mutilé par la division des tâches excessive c’est-à-dire s’il est amené à effectuer dans son travail un très petit nombre de tâches ou de mouvements de manière répétitive et mécanique. Or, cette spécialisation des tâches ne fait que s’accentuer avec la mécanisation. Nous sommes en effet passés de l’artisanat où un artisan réalise un objet du début à la fin, au modèle de l’usine où le travailleur ne fait plus qu’un ou deux éléments de l’objet final. Cette progression de la division des tâches culmine avec le travail à la chaîne où le travailleur effectue un seul geste répétitif entouré de machines qui amènent à lui l’objet. La tâche est de plus en plus simple, les gestes de plus en plus décomposés et mécaniques. L’homme est alors intégré à la machine et il perd ici son humanité.

C’est alors que Marx parle d’aliénation du travail car alors l’homme devient « autre ». Le terme aliénation est construit à partir du latin alienus qui signifie l’autre ou l’étranger. Alors être aliéné ou subir une aliénation c’est devenir étranger à soi-même. Pour Marx, dès lors que le travailleur ne peut plus développer et épanouir ses capacités proprement humaines telles que l’imagination, la raison, le libre arbitre, dans son travail, alors il devient une machine. Cette forme de travail rend l’homme tel un automate, il le rend stupide. On voit un bon exemple de cette folie que le travail à la chaîne produit dans les Temps modernes de Charlie Chaplin.

Le travailleur est dépossédé du fruit de son travail

Par ailleurs, comme les tâches à effectuer sont de plus en plus standardisées et répétitives, le travailleur ne se sent plus l’auteur de son ouvrage, il perd la satisfaction de son travail car il n’en a fait qu’une infime partie et n’y a pas mis de créativité ou d’habileté particulière. C’est pourquoi Marx dit que l’ouvrier est également dépossédé du fruit de son travail. Il n’en tire plus de fierté d’une part et d’autre part, il n’en est plus le propriétaire. En effet, les propriétaires du résultat de son travail sont ceux qui possèdent les moyens de production c’est-à-dire les machines et le capital.

Le travailleur est alors pour finir exploité car comme son travail est peu qualifié et demande peu d’expertise, il est rémunéré un minimum c’est-à-dire selon Marx, juste assez pour qu’il puisse reconstituer sa force de travail et retourner au travail le lendemain. L’ouvrier touche alors juste assez pour avoir un toit et se nourrir. C’est pourquoi, selon Marx, tout ce qui faisait l’humanité du travailleur disparaît. Il est réduit à l’état animal non seulement pendant son travail qu’il subit mais aussi dans sa vie hors de son travail qui se réduit pour une bonne part à être la reconstitution de sa force de travail.

La valeur d’échange du travail diminue car il requiert de moins en moins de compétence et le produit du travail est tellement morcelé que le travailleur ne peut plus ni y imprimer quoi que ce soit de lui-même, ni s’y reconnaître. Non seulement il ne l’humanise plus mais il l’abrutit. Il n’est plus une manifestation de la vie mais un simple moyen d’existence, un travail forcé que l’on fait uniquement pour gagner sa vie.

Il est évident que dans ces conditions le travailleur ne peut pas tirer son bonheur de son travail, c’est plutôt le contraire, son travail fait son malheur.

Voilà pour cet épisode j’espère qu’il vous aura aidé à comprendre un peu la pensée de Marx sur le travail, si vous voulez davantage de contenu sur le thème du travail ou du bonheur, je vous invite à vous rendre sur mon blog apprendre la philosophie.

Citation de Karl Marx sur le travail

Karl Marx défend l'idée que le travail ne permet pas la liberté et le bonheur si l'homme travaille uniquement par nécessité c'est-à-dire uniquement parce qu'il n'a pas le choix et doit subvenir à ses besoins essentiels.

Dans le Capital, Karl Marx défend l’idée que le travail ne permet pas la liberté et le bonheur si l’homme travaille uniquement par nécessité c’est-à-dire uniquement parce qu’il n’a pas le choix et doit subvenir à ses besoins essentiels. Si l’on travaille seulement par nécessité, cela signifie que nous sommes totalement soumis à la nature en nous et à nos besoins naturels qui ont la spécificité de renaître sans cesse. Dès que nous sommes rassasiés, il faut déjà penser au repas suivant. Alors, nous ne sommes pas libres, tout comme les animaux ne sont pas libres et sont contraints de chasser pour survivre. On peut remarquer néanmoins que Marx ne dit pas que le travail est toujours contraire à la liberté. Le travail n’est contraire à la liberté que si nous n’avons pas le choix de travailler. C’est le cas, selon lui, de l’ouvrier qui doit faire un travail pénible et répétitif tous les jours pour gagner un maigre salaire qui lui suffit seulement pour se nourrir et se reposer. En d’autres termes, l’ouvrier gagne juste assez pour « reconstituer sa force de travail » et retourner travailler le lendemain.

En revanche, il est possible de travailler en gardant sa liberté, mais alors cela doit être un travail choisi, que l’on ne fait pas seulement par nécessité. Un travail que l’on fait avec passion et qui nous donne l’occasion de développer nos facultés proprement humaine comme la raison et l’imagination, ne sera pas considéré comme un travail contraire à notre liberté.

Pour davantage d’éléments de cours sur Marx et le travail, vous pouvez consulter cet article : Marx : Le travail rend-il heureux ? Sur la liberté, vous trouverez des éléments sur cette page.

Texte de Karl Marx :

« En fait, le royaume de la liberté commence seulement là où l’on cesse de travailler par nécessité et opportunité imposée de l’extérieur ; il se situe donc, par nature, au-delà de la sphère de la production matérielle proprement dite. De même que l’homme primitif doit lutter contre la nature pour pourvoir à ses besoins, se maintenir en vie et se reproduire, l’homme civilisé est forcé, lui aussi, de le faire et de le faire quels que soient la structure de société et le mode de production. Avec son développement s’étend également le domaine de la nécessité naturelle, parce que les besoins augmentent ; mais en même temps s’élargissent les forces productives pour les satisfaire. En ce domaine, la seule liberté possible est que l’homme social, les producteurs associés, règlent rationnellement leurs échanges avec la nature, qu’ils la contrôlent ensemble au lieu d’être dominés par sa puissance aveugle et qu’ils accomplissent ces échanges en dépensant le minimum de force et dans les conditions les plus dignes, les plus conformes à leur nature humaine. Mais cette activité constituera toujours le royaume de la nécessité. C’est au-delà que commence le développement des forces humaines comme fin en soi, le véritable royaume de la liberté qui ne peut s’épanouir qu’en se fondant sur l’autre royaume, sur l’autre base, celle de la nécessité. La condition essentielle de cet épanouissement est la réduction de la journée de travail. »

  Marx, Le Capital, 1867, livre III, chap. 48

Marx : Le travail rend-il heureux ?

Pour Marx, le travail n'est pas une mauvaise chose en soi, il reconnait même que c'est quelque chose qui distingue les hommes des animaux.

Pour Marx, le travail n’est pas une mauvaise chose en soi, il reconnait même que c’est quelque chose qui distingue les hommes des animaux. Un travail qui permet à l’humain de développer et d’utiliser ses facultés humaines comme sa raison, son imagination ou son libre arbitre est un travail qui améliore l’homme ou du moins qui lui permet d’être réellement humain.

Le problème vient du type de travail et des conditions de travail qui sont données aux êtres humains. Marx écrit au 19e siècle au moment de la révolution industrielle notamment et il critique le travail à l’usine ou à la chaîne car il s’agit d’un travail qui déshumanise l’homme.

Marx parle d’aliénation du travail

Selon Marx, l’homme est mutilé par la division des tâches excessive c’est-à-dire s’il est amené à effectuer dans son travail un très petit nombres de tâches ou de mouvements de manière répétitive et mécanique. Or, cette spécialisation des tâches ne fait que s’accentuer. On est d’abord passé de l’artisanat où un artisan réalise un objet du début à la fin, à la manufacture où le travailleur ne fait plus qu’un ou deux éléments de l’objet final. Cette progression de la division des tâches culmine avec le travail à la chaîne où le travailleur effectue un seul geste répétitif entouré de machines qui amènent à lui l’objet. La tâche est de plus en plus simple, les gestes de plus en plus décomposés et mécaniques. L’homme est alors intégré à la machine et il perd ici son humanité.

C’est alors que Marx parle d’aliénation du travail car alors l’homme devient « autre ». Le terme aliénation est construit à partir du latin alienus qui signifie l’autre ou l’étranger. Alors être aliéné ou subir une aliénation c’est devenir étranger à soi-même. Pour Marx, dès lors que le travailleur ne peut plus développer et épanouir ses capacités proprement humaines telles que l’imagination, la raison, le libre arbitre, dans son travail , alors il devient une machine. Cette forme de travail rend l’homme tel un automate, il le rend stupide. On voit un bon exemple de cette folie que le travail à la chaîne produit dans les Temps modernes de Charlie Chaplin.

Le travailleur est dépossédé du fruit de son travail

Par ailleurs, comme les tâches à effectuer son de plus en plus standardisées et répétitives, le travailleur ne se sent plus l’auteur de son ouvrage, il perd la satisfaction de son travail car il n’en a fait qu’une infime partie et n’y a pas mis de créativité ou d’habileté particulière. C’est pourquoi Marx dit que l’ouvrier est également dépossédé du fruit de son travail. Il n’en tire plus de fierté d’une part et d’autre part, il n’en est plus le propriétaire. En effet, les propriétaires du résultat de son travail sont ceux qui possèdent les moyens de production c’est-à-dire les machines et le capital.

Le travailleur est alors pour finir exploité car comme son travail est peu qualifié et demande peu d’expertise, il est rémunéré un minimum c’est-à-dire selon Marx, juste assez pour qu’il puisse reconstituer sa force de travail et retourner au travail le lendemain. L’ouvrier touche alors juste assez pour avoir un toit et se nourrir. C’est pourquoi, selon Marx, tout ce qui faisait l’humanité du travailleur disparaît. Il est réduit à l’état animal non seulement pendant son travail qu’il subit mais aussi dans sa vie hors de son travail qui se réduit pour une bonne part à être la reconstitution de sa force de travail.

La valeur d’échange du travail diminue car il requiert de moins en moins de compétence et le produit du travail est tellement morcelé que le travailleur ne peut plus ni y imprimer quoi que ce soit de lui-même, ni s’y reconnaître. Non seulement il ne l’humanise plus mais il l’abrutit. Il n’est plus une manifestation de la vie mais un simple moyen d’existence, un travail forcé que l’on fait uniquement pour gagner sa vie.

Il est évident que dans ces conditions le travailleur ne peut pas tirer son bonheur de son travail, c’est plutôt le contraire, son travail fait son malheur.

Texte de Marx :

En quoi consiste la dépossession du travail ?

D’abord, dans le fait que le travail est extérieur à l’ouvrier, c’est-à-dire qu’il n’appartient pas à son être ; que, dans son travail, l’ouvrier ne s’affirme pas, mais se nie ; qu’il ne s’y sent pas satisfait, mais malheureux ; qu’il n’y déploie pas une libre énergie physique et intellec­tuelle, mais mortifie son corps et ruine son esprit. C’est pourquoi l’ouvrier n’a le sentiment d’être à soi qu’en dehors du travail; dans le travail, il se sent extérieur à soi-même. Il est lui quand il ne travaille pas et, quand il travaille, il n’est pas lui. Son travail n’est pas volon­taire, mais contraint. Travail forcé, il n’est pas la satisfaction d’un besoin, mais seulement un moyen de satisfaire des besoins en dehors du travail. La nature aliénée du travail apparaît nettement dans le fait que, dès qu’il n’existe pas de contrainte physique ou autre, on fuit le travail comme la peste. Le travail aliéné, le travail dans lequel l’homme se dépossède, est sacrifice de soi, mortification. Enfin, l’ouvrier ressent la nature extérieure du travail par le fait qu’il n’est pas son bien propre, mais celui d’un autre, qu’il ne lui appartient pas, que dans le travail l’ouvrier ne s’appartient pas à lui-même, mais à un autre (…).

On en vient donc à ce résultat que l’homme (l’ouvrier) n’a de spontanéité que dans ses fonctions animales, le manger, le boire et la procréation, peut-être encore dans l’habitat, la parure, etc ; et que, dans ses fonctions humaines, il ne sent plus qu’animalité : ce qui est animal devient humain, et ce qui est humain devient animal.

Karl Marx, Ébauche d’une critique de l’économie politique. (Manuscrit de 1844.)