Bergson, l’inconscient : obstacle à la liberté ?

Bergson défend que nos actions et nos pensées ont tendance à devenir des automatismes, c'est-à-dire qu'elles sont prises en charges par l'inconscient.

Bergson, philosophe français du XXe siècle, défend dans l’Energie spirituelle, que nos actions et nos pensées ont tendance à devenir des automatismes, c’est-à-dire qu’elles deviennent inconscientes. Selon lui, notre conscience est limitée et ne peut prendre en charge une quantité infinie de données ou d’actions. Il y a donc un moment où c’est l’inconscient qui prend le relais.

La conscience est liberté

Selon Bergson, les moments où nous sommes le plus conscient sont notamment les moments où nous devons apprendre quelque chose de nouveau. On peut penser, par exemple, à l’apprentissage d’un instrument ou encore à l’apprentissage de la conduite. Chacun se souvient à quel point, il fût d’abord difficile de coordonner nos différents mouvements lors de nos premières leçons de conduite. La difficulté était alors que nous devions faire réellement attention à nos différents mouvements et que notre conscience était saturée. Nous avions du mal à faire attention à tout et cela nous demandait beaucoup d’énergie. Mais cette difficulté s’efface dès lors que nos mouvements deviennent habituels, alors c’est l’inconscient qui prend en charge ces mouvements et ils deviennent automatiques c’est-à-dire que nous pouvons les réaliser sans y faire attention et en faisant autre chose en même temps, par exemple, parler à quelqu’un.

Un autre moment où nous restons particulièrement conscients, selon lui, sont les moments de « crises intérieures » c’est-à-dire les moments où nous devons faire un choix important pour notre avenir et où nous avons clairement conscience que la décision que nous allons prendre aura des conséquences pour nous. Alors, nous essayons d’anticiper les conséquences de nos choix et nous sommes le plus attentifs possibles afin de faire le meilleur choix possible. Dans cette situation nos pensées et nos actes sont pleinement conscients, mais en dehors de ces moments le plus gros de nos actions et pensées relèvent davantage d’automatismes et d’habitude c’est-à-dire de notre inconscient.

Quelle liberté nous reste-t-il dans cette situation ?

Le fait que la majorité de nos pensées et actions soient inconscientes et de l’ordre de l’automatisme peut nous faire gagner une certaine liberté d’action car alors il est possible de faire plusieurs choses en même temps par exemple. Mais, dans le même temps, nous perdons notre libre arbitre car quand nos actions ou pensées sont automatiques, il ne nous est plus possible de les choisir, cela se fait tout seul. C’est pourquoi en ce sens l’inconscient est plutôt un obstacle à la liberté car nous ne pouvons plus exercer notre liberté de choix. A moins de faire l’effort de redevenir conscient de nos automatismes pour les changer.

Les personnes qui ont lu cet article ont aussi lu  Sigmund Freud : L'hypothèse de l'inconscient

En effet, si l’inconscient semble en ce sens un obstacle à notre liberté, nous gardons néanmoins la possibilité de changer nos habitudes. Cela signifie que nous devons reprendre conscience de nos automatismes pour prendre de nouvelles habitudes de manière consciente, qui ensuite deviendront des automatismes inconscients. L’inconscient n’est donc pas un si grand obstacle à notre liberté.

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Texte de Bergson sur l’inconscient :

Qu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s’en retire. Dans l’apprentissage d’un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des mouvements que nous exécutons, parce qu’il vient de nous, parce qu’il résulte d’une décision et implique un choix ; puis, à mesure que ces mouvements s’enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d’autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait ? Les variations d’intensité de notre conscience semblent donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sur notre conduite. Si conscience signifie mémoire et anticipation, c’est que conscience est synonyme de choix.

Henri Bergson, « La conscience et la vie » (1911), dans L’Energie spirituelle.

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