Citation de Spinoza

Citation de Spinoza
Citation de Spinoza

Pour Spinoza, nous avons tendance à nous moquer des hommes et à les juger durement car nous croyons à la toute puissance du libre arbitre. Nous pensons que l’homme est libre et donc pleinement responsable de ses choix, là où, en réalité, les hommes sont déterminés par les circonstances et par leurs passions. C’est ce que dit Spinoza dans l’Ethique, les hommes croient être libres car ils n’ont pas conscience des causes qui les déterminent. Ils ne voient pas à quel point, ils sont influencés par des causes antérieures qui agissent sur leurs choix.

La conséquence de cette illusion, pour Spinoza, est que nous avons tendance à émettre des jugements moraux sur la conduite des autres, en les louant ou en les blâmant, car nous les pensons pleinement responsables de leurs actes. Nous allons également nous indigner, pleurer ou nous moquer face à ce que nous pensons être un mauvais usage du libre arbitre. Mais, pour Spinoza, ces jugements et ces réactions émotionnelles n’ont pas grand sens et il vaut mieux philosopher et chercher à comprendre la nature humaine plutôt que de blâmer les hommes pour des comportements qu’ils n’ont pas choisi.

« Ni rire, ni pleurer, ni détester, mais comprendre ». Cette citation de Spinoza, nous enjoint donc à chercher à comprendre plutôt qu’à blâmer.

Texte pour comprendre la citation de Spinoza :

« La plupart de ceux qui ont parlé des sentiments et des conduites humaines paraissent traiter, non de choses naturelles qui suivent les lois ordinaires de la Nature, mais de choses qui seraient hors Nature. Mieux, on dirait qu’ils conçoivent l’homme dans la Nature comme un empire dans un empire. Car ils croient que l’homme trouble l’ordre de la Nature plutôt qu’il ne le suit, qu’il a sur ses propres actions une puissance absolue et qu’il n’est déterminé que par soi.

Et ils attribuent la cause de l’impuissance et de l’inconstance humaines, non à la puissance ordinaire de la Nature, mais à je ne sais quel vice de la nature humaine : et les voilà qui pleurent sur elle, se rient d’elle, la méprisent ou, le plus souvent, lui vouent de la haine ; qui sait avec plus d’éloquence ou de subtilité accabler l’impuissance de l’esprit humain passe pour divin. Sans doute n’a-t-il pas manqué d’hommes éminents (et nous avouons devoir beaucoup à leur labeur, à leur ingéniosité) pour écrire sur la droite conduite de la vie beaucoup de choses excellentes et pour donner aux mortels de sages conseils : mais la nature des sentiments, leur force impulsive et, à l’inverse, le pouvoir modérateur de l’esprit sur eux, personne, à ma connaissance, ne les a déterminés. Je sais bien que le très illustre Descartes, encore qu’il ait cru au pouvoir absolu de l’esprit sur ses actions, a tenté l’explication des sentiments humains par leurs causes premières et à montrer en même temps comment l’esprit peut dominer absolument les sentiments ; mais, à mon avis, il n’a rien montré du tout que l’acuité de sa grande intelligence, comme je le démontrerai en son lieu.

Je veux donc revenir à ceux qui préfèrent haïr ou railler les sentiments et les actions des hommes, plutôt que de les comprendre. Sans doute leur paraîtra-t-il extraordinaire que j’entreprenne de traiter des vices et de la futilité des hommes selon la méthode géométrique, que je veuille démontrer par un raisonnement rigoureux (certa) ce qu’ils proclament sans cesse contraire (repugnare) à la Raison, cela même qu’ils disent vain, absurde et horrifique. Mais voici mon argument (ratio). Il ne se produit rien dans la Nature qui puisse lui être attribué comme un vice inhérent ; car la Nature est toujours la même, et partout sa vertu et sa puissance d’action (agendi) est une et identique. Ce qui signifie que les lois et les règles de la Nature, suivant lesquelles toute chose est produite et passe d’une forme à une autre, sont partout et toujours les mêmes, et par conséquent il ne peut exister aussi qu’un seul et même moyen de comprendre la nature des choses, quelles qu’elles soient : par les lois et les règles universelles de la Nature.

Voilà pourquoi les sentiments de haine, de colère, d’envie, etc., considérés en eux-mêmes, obéissent à la même nécessité et à la même vertu de la Nature que les autres choses singulières ; et par suite ils admettent des causes rigoureuses (certas) qui les font comprendre, et ils ont des propriétés bien définies (certas) tout aussi dignes d’être connues que les propriétés d’une quelconque autre chose dont la seule considération nous satisfait. Je traiterai donc de la nature et de la force impulsive des sentiments et de la puissance de l’esprit sur eux selon la même méthode qui m’a précédemment servi en traitant de Dieu et de l’Esprit, et je considérerai les actions et les appétits humains de même que s’il était question de lignes, de plans ou de corps ».

Spinoza, Ethique, III, De l’origine et de la nature des sentiments

le stoïcisme

Qu’est-ce que le stoïcisme ?

Le stoïcisme est une école philosophique fondée à Athènes par Zénon de Citium vers l’an 300 avant Jésus-Christ. Cette école va s’appeler l’Ecole du Portique car son fondateur enseigne sous un portique c’est-à-dire une sorte de voûte. Cette philosophie va se répandre petit à petit pour devenir très populaire à Rome à partir du 1er siècle après Jésus-Christ.

Le stoïcisme

Le stoïcisme est alors une philosophie qui concerne toutes les couches sociales puisque l’on compte des empereurs stoïciens comme Marc Aurèle, mais également un esclave stoïcien bien connu: Epictète. La philosophie stoïcienne développe des idées dans les domaines de la physique, de la logique et de la morale. Ils s’intéressent donc notamment à la manière de bien vivre. Leur but est d’atteindre la sagesse, et par voie de conséquence le bonheur. C’est à ce domaine de la morale stoïcienne que je vais m’intéresser plus particulièrement ici.

En quoi consiste la morale stoïcienne ?

Pour bien comprendre le stoïcisme, il faut d’abord avoir en tête que les stoïciens pensent qu’il n’y a pas de hasard ou de contingence, tout est nécessaire, tout est écrit à l’avance. Cela réduit donc très considérablement la liberté humaine, car les hommes sont, à leurs yeux, pris dans des enchaînements de causes-conséquences et ne peuvent être cause complète. Cela signifie qu’ils ne peuvent pas faire surgir un événement ou une décision à partir de leur seule volonté. Pourquoi cela ? Car un être humain ne se détermine pas à partir de rien, même si nous faisons des choix, ces choix nous les faisons en nous basant sur nos expériences passées, nos connaissances, la situation présente etc… En d’autres termes, il y a dans nos histoires des choses qui causent au moins en partie nos décisions. Le stoïcien Chrysippe prend un exemple pour expliquer ce point. Supposons une pierre qui se trouve tout au fond de la mer, une pierre par définition peut être brisée, c’est une possibilité. Pourtant dans les circonstances présentes, on peut dire qu’il est impossible qu’elle soit brisée car l’eau amortit les chocs. De même, si nous disons qu’il est possible que la bataille n’ait pas lieu car il est possible que le général refuse de se battre, c’est parce que nous ignorons les circonstances dans lesquelles se trouve le général. En réalité, tout comme la pierre au fond de l’eau, dans ces circonstances, il n’est pas possible que le général décide autre chose que de commencer la bataille. Les êtres humains, pour les stoïciens, sont grandement influencés dans leurs actions par une multitude de facteurs qu’ils ne contrôlent pas, leur liberté est donc très limitée. Pourtant, il reste une part de liberté. Nous ne choisissons pas ce qui nous arrive ou ce que nous faisons, mais nous choisissons la manière dont nous vivons ce qui nous arrive et la manière dont nous faisons les choses.

Le stoïcisme prône la vertu comme perfection

La morale stoïcienne découle donc de cette idée que tout est nécessaire. Car si tout est nécessaire alors ce qui importe ça n’est donc plus le chemin que nous parcourons mais la manière dont nous le parcourons. Or, nous pouvons le parcourir en étant malheureux et soumis aux événements ou bien en cherchant constamment à bien faire ce qui dépend de nous, tout en acceptant ce qui ne peut être changé.

Pour le stoïcisme, la valeur d’une action ne vient pas de son résultat car ce résultat ne dépend pas seulement de nous, mais de l’attitude de celui qui agit. Si nous faisons quelque chose en visant le bien et en y mettant toutes nos forces, alors même si nous échouons, nous pouvons dire que nous avons bien agi. D’ailleurs, nous pourrons être satisfait d’avoir bien agi et cela peut nous permettre d’atteindre le bonheur.

Le bonheur ne vient pas de l’argent, du statut social ou du plaisir, mais de la vertu

Le bonheur vient-il de l’argent ou du statut social ?

Les stoïciens remarquent que si les richesses peuvent être utiles, elles ne garantissent pas pour autant le bonheur. Il est possible d’être très riche mais constamment anxieux à cause même de cet argent. Le statut social peut nous aider à être heureux, mais il peut aussi nous attirer des jalousies, de la convoitise. La santé semble un bien nécessaire au bonheur, et pourtant, elle n’est pas suffisante et des humains en très bonne santé sont malheureux, alors que d’autres en mauvaise santé sont heureux. Qu’en déduisent les stoïciens ? La seule chose qui nous rendra toujours heureux c’est la satisfaction que nous ressentons quand nous avons conscience d’avoir bien agi, d’avoir agi en visant le bien, avec une certaine perfection. Ce que les stoïciens nomment la vertu.

Stoïcisme : comment alors atteindre et rester dans l’excellence ?

Pour les stoïciens, nous ne pouvons agir parfaitement en visant le bien qu’en n’étant pas constamment soumis aux événements plus ou moins difficiles ou aux actions des autres. Le sage n’est plus sage quand il se met en colère parce qu’il a été insulté. En faisant, cela il risque d’agir mal et dans le même temps, il n’est plus libre car il se laisse déterminer par celui qui l’a insulté. De même, il n’est plus heureux car la colère et le ressentiment ne sont pas des sentiments agréables. On peut même penser qu’il s’en voudra de s’être laissé emporté.

Pour le stoïcisme, le sage est donc celui qui fortifie son esprit afin de devenir semblable à une citadelle imprenable, ou encore à un roc battu par la tempête, mais qui reste tout à fait immobile et calme. Le sage est impassible, il ne se laisse pas atteindre par ce qui arrive autour de lui et continue à agir en visant le bien.

Mais comment atteindre ce calme ? Epictète dit ainsi « ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, ce sont les jugements qu’ils portent sur les choses ». Il veut dire par là que ce ne sont pas tellement les événements ou ce qui nous arrive qui nous mettent en colère ou nous rendent triste, mais la manière dont nous percevons ces événements.

Il faut contrôler ses représentations pour le stoïcisme.

Il faut donc travailler sur les représentations que nous avons des choses jusqu’à ce qu’elles ne provoquent plus en nous de réactions émotionnelles excessives. Une des manières de procéder pour les stoïciens consiste à définir clairement la chose qui provoque en nous colère, peur, etc… Si nous réagissons excessivement, si nous sommes inquiets c’est parce que nous ne connaissons pas réellement cette chose qui nous fait peur et nous laissons abuser par les apparences. Cela nous semble dangereux donc nous avons peur. Ainsi, pour les stoïcien, celui qui ne réfléchit pas et entend l’orage, va dire « ce son est effrayant », et il en déduira rapidement et sans réfléchir « ce son est signe de danger ». Or, au contraire, le sage stoïcien ne se laisse pas contrôler par sa première représentation. Il a cherché à comprendre la nature des choses et donc il sait que le tonnerre est simplement un frottement de deux nuages. Il sait également dans quelles situations l’orage peut être dangereux et quand il n’a rien à craindre. Il évitera simplement de se tenir sous un arbre isolé pendant l’orage.

De même, pour le stoïcisme, la mort n’est pas à craindre, il s’agit simplement d’un désassemblage d’éléments. L’homme est un composé de chair, de souffle et d’une faculté de jugement. La mort n’est ni un bien, ni un mal, elle fait partie du cycle de la vie. Marc Aurèle conseille donc pour ne pas avoir peur de la mort de revenir à sa définition la plus stricte. La mort est une transformation, un phénomène strictement naturel qui n’est pas mauvaise et est même nécessaire pour que de nouveaux assemblages de parties puissent se faire. Pour lui, la peur de la mort naît parce que l’on imagine une disparition totale de notre être, mais ça n’est pas ce qui se produit, la mort n’est qu’un réassemblage d’éléments dans un ordre différent.

Distinguer ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas.

Une autre manière de rester calme et donc libre et heureux pour le stoïcisme, consiste à bien faire la différence entre ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas. Pourquoi est-ce important ? Parce que si nous pensons avoir le contrôle sur ce qui, en réalité, ne dépend pas de nous alors nous allons nécessairement échouer et donc nous sentir impuissants et malheureux. Par exemple, celui qui veut absolument que l’on dise du bien de lui sera malheureux car ce que les autres disent ne dépend pas de lui. De même, celui qui voudrait ne pas vieillir, échouera nécessairement, car ici encore cela ne dépend pas de lui. Pour les stoïciens, il faut donc focaliser nos actions sur ce qui dépend de nous. Alors seulement, nos actions pourront avoir des résultats positifs et nous pourrons être satisfaits de ce que nous avons accompli. Parmi ces choses qui dépendent de nous, il y a évidemment nos pensées et nos représentations. C’est en maîtrisant nos pensées que nous pouvons rester impassible et donc rester libre et heureux.

Pour davantage de contenu sur le bonheur, vous pouvez consulter cette page.

Ou regarder ma vidéo :

Thoreau : Peut-on désobéir aux lois ?

Thoreau écrit De la désobéissance civile qui est considéré aujourd'hui comme un des ouvrages fondateurs du concept de désobéissance civile.

Henry David Thoreau est connu pour être parti vivre durant deux ans et deux mois dans la forêt de son ami Emerson. Son oeuvre Walden ou la vie dans les bois est un récit de son séjour dans la nature, il en fait l’éloge et défend les bienfaits de la simplicité pour atteindre le bonheur. Il savoure sa liberté et tient à la conserver, mais il s’est aussi intéressé à la vie des autres et consacre une partie de sa vie à la défense de leurs droits. Il combat pour la liberté de tous les êtres humains et en particulier des esclaves.

Thoreau écrit De la désobéissance civile paru en 1849 qui est considéré aujourd’hui comme un des ouvrages fondateurs du concept de désobéissance civile. Thoreau a, en effet, au cours de sa vie, pratiqué de nombreuses fois la désobéissance. A l’âge de 29 ans, il refuse de payer ses impôts pour protester contre la politique esclavagiste et belliciste des Etats-Unis. La somme est ridicule, mais comme il s’agit pour lui d’une question de morale, il refuse de payer et est jeté en prison.

Selon lui, les citoyens sont avant tout des êtres humains, c’est-à-dire que le fait qu’ils vivent en société en se soumettant à des lois, ne signifie pas qu’ils peuvent accepter de se soumettre à des lois injustes. Ainsi, pour lui, si la loi est injuste et si le citoyen juge en conscience qu’elle l’est alors il a le devoir d’y désobéir. C’est ce qu’il fait notamment avec l’esclavage. Il accueille des esclaves en fuite chez lui et en aide quelques-uns alors que les autorités de son pays pourchassent les esclaves et demandent aux citoyens de les dénoncer.

Thoreau pense qu’un seul citoyen par son refus de respecter la loi peut être un grain de sable qui va dérégler le système entier et cela est encore plus vrai si un grand nombre de citoyens se mettent à désobéir. Selon lui, si le citoyen juge une loi injuste, il ne doit pas y obéir quand même en attendant de pouvoir la changer, mais doit y désobéir immédiatement. Pour lui, il y a peu de chance que le citoyen arrive à changer la loi par le dialogue ou le seul militantisme, en revanche s’il désobéit il peut bloquer le gouvernement.

Texte de Thoreau :

« Le citoyen doit-il un seul instant, dans quelque mesure que ce soit, abandonner sa conscience au législateur ? Pourquoi, alors, chacun aurait-il une conscience ? Je pense que nous devons d’abord être des hommes, des sujets ensuite. Le respect de la loi vient après celui du droit. La seule obligation que j’aie le droit d’adopter, c’est d’agir à tout moment selon ce qui me paraît juste (…).

La masse des hommes sert l’Etat de la sorte, pas en tant qu’hommes, mais comme des machines, avec leurs corps. Ils forment l’armée de métier, ainsi que la milice, les geôliers, policiers, posse comitatus, etc. Dans la plupart des cas, il n’existe aucun libre exercice du jugement ou du sens moral ; mais ils se mettent au niveau du bois, de la terre et des pierres ; et l’on pourrait réaliser des hommes de bois qui rempliraient aussi bien cette fonction. Ils ne méritent pas plus de respect que des épouvantails ou un étron. Ils ont la même valeur que des chevaux ou des chiens. Pourtant, ce sont de tels êtres qu’on juge communément de bons citoyens. D’autres – comme la plupart des législateurs, politiciens, juristes, ministres ou fonctionnaires – servent l’Etat surtout avec leur tête ; et, comme ils font rarement la moindre distinction morale, ils risquent tout autant de servir le Diable, sans en avoir l’intention, que Dieu. Un tout petit nombre – héros, patriotes, martyrs, réformateurs au sens fort, des hommes enfin, servent l’Etat avec leur conscience aussi et lui résistent nécessairement pour l’essentiel ; il les traite souvent en ennemis.

Il existe des lois injustes : consentirons-nous à leur obéir ? Tenterons-nous de les amender en leur obéissant jusqu’à ce que nous soyons arrivés à nos fins – ou les transgresserons-nous tout de suite ? En général, les hommes, sous un gouvernement comme le nôtre, croient de leur devoir d’attendre que la majorité se soit rendue à leurs raisons. Ils croient que s’ils résistaient, le remède serait pire que le mal. […]

Une minorité ne peut rien tant qu’elle se conforme à la majorité ; ce n’est même pas alors une minorité. Mais elle est irrésistible lorsqu’elle fait obstruction de tout son poids. S’il n’est d’autre alternative que celle-ci : garder tous les justes en prison ou bien abandonner la guerre et l’esclavage, l’État n’hésitera pas à choisir. Si un millier d’hommes devaient s’abstenir de payer leurs impôts cette année, ce ne serait pas une initiative aussi brutale et sanglante que celle qui consisterait à les régler, et à permettre ainsi à l’État de commettre des violences et de verser le sang innocent. Cela définit, en fait, une révolution pacifique, dans la mesure où pareille chose est possible.

Si le percepteur ou quelque autre fonctionnaire me demande, comme ce fut le cas : « Mais que dois-je faire ? », je lui réponds : « Si vous voulez vraiment faire quelque chose, démissionnez ! » Quand le sujet a refusé obéissance et que le fonctionnaire démissionne, alors la révolution est accomplie. »

Thoreau, La désobéissance civile, 1849.

Comment faire un plan dialectique pour sa dissertation

Comment faire un plan dialectique pour sa dissertation

Dans cette vidéo, je vais vous expliquer comment construire un plan dialectique pour votre dissertation de philosophie.

Dans une précédente vidéo, je vous ai montré comment analyser le sujet et formuler la problématique, si vous ne l’avez pas vu, je vous conseille de la regarder. le lien apparait en haut à droite de la vidéo. Cette étape est importante car si vous avez bien formulé la problématique, vous avez déjà un début de plan dialectique.

En effet, en montrant le problème du sujet, c’est-à-dire en montrant qu’il y a au moins deux réponses qui s’opposent sur ce sujet, vous avez déjà une idée de la première et de la deuxième partie de votre plan. Par exemple, sur le sujet « le bonheur est-il un idéal inaccessible ? », vous pouvez d’abord défendre dans une première partie qu’effectivement le bonheur semble difficilement accessible. Puis dans une seconde partie, vous développerez une argumentation qui défendra au contraire que le bonheur est bien un idéal accessible. Vous commencerez alors un plan de dissertation que l’on nomme plan dialectique.

Alors qu’est-ce qu’un plan dialectique ? Et avec quoi ne faut-il pas le confondre ?

Le principe du plan dialectique est que votre devoir doit être organisé comme un débat. Votre plan va alors prendre la forme suivante : thèse/antithèse/thèse. Cela signifie que par exemple si le sujet est « Faut-il rechercher le bonheur ? », votre première partie doit répondre soit oui, il faut rechercher le bonheur, soit non il ne faut pas recherche le bonheur. Et si votre première partie défend plutôt oui, alors la deuxième partie doit s’y opposer et défendre plutôt que non. Enfin si vous avez défendu le non en deuxième partie, votre troisième partie devrait plutôt s’y opposer et défendre que oui.

Il est aujourd’hui plutôt déconseillé de faire une synthèse en troisième partie, car cela entraîne très souvent des troisièmes parties peu intéressantes où l’on finit sur un « peut-être que oui, peut-être que non ». Or, le but de la dissertation est tout de même d’arriver à une réponse argumentée relativement solide. En d’autres termes, il faut que vous preniez position sur le sujet dans un sens ou dans un autre. Le correcteur doit pouvoir dire à la fin si vous avez répondu plutôt oui ou plutôt non au sujet.

Par ailleurs, il faut vous assurer que chacune de vos parties réponde au sujet dans son intégralité et éviter le plan thématique qui justement risque de ne pas répondre au sujet. Le pire consiste à découper le sujet selon les différentes notions du sujet et à les traiter séparément dans les parties. Par exemple, sur le sujet « un homme libre est-il nécessairement heureux ? » où il y a deux grandes notions du programme la liberté et le bonheur, si vous faites : Première partie le bonheur, deuxième partie la liberté, troisième partie le bonheur et la liberté, alors vos deux premières parties sont hors sujet car elles ne répondent pas au sujet. En effet, expliquer ce qu’est le bonheur dans une première partie ne répond pas à la question de savoir si un homme libre est nécessairement heureux.

Donc point très important, chacune de vos parties doit répondre au sujet de manière claire sinon vous risquez de faire un hors sujet.

A présent nous allons voir comment construire son plan concrètement ? Je vais vous donner d’abord une méthode à suivre si vous êtes totalement débutant en philosophie. Disons que c’est un bon point de départ si vous êtes en terminale.

Le but est de construire un plan qui fasse thèse/antithèse/thèse : si je simplifie beaucoup cela signifie que vous devez arriver à quelque chose comme oui/non/oui ou non/oui/non.

Il faut alors que vous commenciez par déterminer quelle est la position que vous voulez défendre pour finir c’est-à-dire en troisième partie car vous allez construire votre plan en fonction de cela. La thèse que vous défendez en troisième partie doit être celle qui vous semble la plus juste et la plus convaincante.

Une fois que vous avez déterminé la réponse que vous voulez défendre pour finir, il vous faut construire vos parties 1 et 2 en conséquences.

Si vous voulez finir en défendant non alors votre deuxième partie devra défendre le oui et la première le non.

Il y a alors deux cas de figures possibles :

– soit vous n’avez pas d’avis particulier sur le sujet et ne voulez pas défendre une thèse en particulier, alors vous allez simplement vous demandez pour quelle réponse au sujet vous avez le plus d’arguments. Par exemple, si sur le sujet le bonheur est-il un idéal inaccessible ?, vous avez d’avantage d’arguments pour défendre que le bonheur est bien inaccessible alors vous ferez un plan en Oui/Non/Oui. Vous veillerez évidemment à ce que les arguments les plus forts soient dans la troisième partie car ce sont ceux qui ont résisté aux objections de la deuxième partie.

– soit vous voulez défendre une réponse en particulier, alors vous allez organiser votre plan de manière à finir en troisième partie par la réponse que vous voulez défendre. Ceci car dans un discours ou une argumentation, les éléments qui arrivent en dernier sont souvent les plus forts et ceux qui vont rester en mémoire. Dans ce cas, si vous voulez finir par la thèse selon laquelle le bonheur n’est pas un idéal inaccessible, alors vous allez faire un plan en Non/Oui/Non.

A présent je vais vous expliquer comment faire une très bonne troisième partie. Chose que vous pourriez arriver à faire avec un peu de pratique de la philosophie et qui correspond à un niveau plus confirmé.

Il y a plusieurs façons de faire une bonne troisième partie dans un plan dialectique. Le mieux est de faire en sorte que la troisième partie apporte réellement quelque chose et fasse progresser l’argumentation et la définition des termes du sujet.

Une façon de faire encore facile consiste à s’appuyer sur un élément secondaire du sujet comme l’adverbe. Par exemple, si le sujet est : « un homme libre est-il nécessairement heureux ? » alors vous pouvez vous appuyer sur le « nécessairement » pour montrer qu’un homme libre peut souvent être heureux mais pas nécessairement.

Je vais à présent vous présenter deux manières de faire une troisième partie qui me semblent parmi les plus habiles :

– 1er façon de faire : Faire une troisième partie en s’appuyant sur une distinction conceptuelle. Qu’est-ce que cela signifie ? Dans votre devoir, vous devez gagner en précision dans la définition des termes du sujet et notamment distinguer de plus en plus le terme principal des autres termes qui semblent d’abord proches mais n’ont cependant pas exactement le même sens. Par exemple, si vous avez le terme bonheur dans le sujet, les termes proches sont plaisir et joie. Ainsi, si le sujet est « le bonheur est-il un idéal inaccessible ? », vous pourriez faire une troisième partie qui défend que le bonheur entendu comme état de satisfaction durable et global est sans doute inaccessible, mais que ça n’est peut-être pas le cas de la joie entendue comme état de satisfaction plus éphémère et plus intense ressenti lorsque l’on réussit quelque chose qui a demandé des efforts. Vous pourriez alors finir en défendant que le bonheur est bien inaccessible mais pas la joie. Vous proposez alors une réponse intéressante au sujet en précisant le sens des termes.

– 2e façon de faire : Faire une troisième partie en « dépassant » le sujet. Il n’est pas rare d’entendre que la troisième partie doit opérer un dépassement du sujet. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela peut signifier, par exemple, que l’on va montrer qu’il y a peut-être une manière plus satisfaisante et intéressante de poser le problème en déplaçant le point de vue que l’on adopte pour traiter le sujet. Le risque néanmoins ici est de changer complètement le sujet et de faire un hors sujet. Faire une troisième partie de ce type demande donc une très bonne compréhension du sujet.

Comment faire pour éviter un hors sujet dans ce cas ?

D’abord, il faut être conscient que cette forme de troisième partie ne sera pas toujours possible ou ne conviendra pas toujours à la direction qu’a prise votre argumentation. Ne cherchez donc pas à faire ainsi à toute force.

Une bonne manière de dépasser le sujet peut consister à reposer le sujet non pas en terme de possibilité mais en terme de légitimité ou de valeur. Par exemple, si le sujet est « Peut-on échapper au temps ? », après avoir fait les deux premières parties en traitant de la possibilité ou non d’échapper au temps, vous pouvez en troisième partie, vous demandez si la question ne serait pas plutôt de savoir s’il est souhaitable de vouloir échapper au temps.  est-ce légitime ? est-ce bien ? Alors la troisième partie de votre plan dialectique défendra par exemple que même s’il était possible d’échapper au temps ce n’est peut-être pas souhaitable. 

Pour davantage de cours sur la méthode de la dissertation, vous pouvez consulter cette page ou regarder mes autres vidéos sur la méthode de la dissertation.

Hobbes : L’homme est un loup pour l’homme »

l'homme est un loup pour l'homme
Thomas Hobbes

Si Hobbes dit que l’homme est un loup pour l’homme c’est parce qu’il cherche à justifier la nécessité de l’Etat. Il fait alors une hypothèse sur la nature des rapports entre les hommes s’il n’y avait pas d’Etat et pas de lois. C’est alors qu’il dit qu’à l’état de nature, l’homme est un loup pour l’homme. Qu’entend-il par là ?

Selon lui, si les hommes vivaient sans force supérieure pour faire régner la paix entre eux alors chaque individu serait mû par son instinct de conservation et chercherait donc à survivre mais également à gagner en puissance. Le problème apparaît quand les hommes qui souhaitent se conserver veulent les mêmes choses. Alors, selon Hobbes, ils vont entrer en concurrence et parfois se battre. Est-ce que pour autant tous les hommes en viendraient à la violence ?

Pour Hobbes, la majorité des hommes sont plutôt rationnels, ils voient donc qu’il n’est pas réellement dans leur intérêt d’être violent avec les autres car alors les autres risquent d’être violents avec eux. Néanmoins, certains individus ne sont pas rationnels et vont donc attaquer les autres. C’est pourquoi même ceux qui sont rationnels ont peur et vont comprendre que s’ils veulent survivre ils doivent attaquer à leur tour et même attaquer préventivement. Ce qui a pour conséquence d’instaurer un état de guerre permanent entre les individus.

Vous remarquez que « l’homme est un loup pour l’homme » ne signifie pas que les hommes sont méchants ou mauvais par nature, mais simplement que, dans une certaine situation, leur instinct de conservation et leur peur de mourir les poussent à se défendre et à se battre.

Cet état de guerre est un état de désolation où les hommes vivent malheureux car on ne peut rien construire, rien apprendre et rien créer quand on a constamment peur pour sa vie et que l’on est en train d’attaquer ou de se défendre. C’est pourquoi, selon Hobbes, les hommes qui sont rationnels décident de renoncer à leur pouvoir de se défendre pour se soumettre à un roi qui fera régner l’ordre entre les individus car il sera craint de tous. Ils sont alors soumis au roi mais n’ont plus à craindre d’être soumis par les autres. Ce roi incarne l’Etat.

Retrouvez davantage de cours sur la politique sur cette page.

Texte de Hobbes :

« Par cela il est manifeste que pendant ce temps où les humains vivent sans qu’une puissance commune ne leur impose à tous un respect mêlé d’effroi, leur condition est ce qu’on appelle la guerre ; et celle-ci est telle qu’elle est une guerre de chacun – contre chacun. En effet, la GUERRE ne consiste pas seulement dans la bataille ou dans l’acte de combattre, mais dans cet espace de temps pendant lequel la volonté d’en découdre par un combat est suffisamment connue (…).

Donc toutes les conséquences du temps de guerre, où chacun est l’ennemi de chacun, sont les mêmes que celles du temps où les humains vivent sans autre sécurité que celle procurée par leur propre force, ou leur propre ingéniosité. Dans une telle situation, il n’y a de place pour aucune entreprise parce que le bénéfice est incertain, et, par conséquent, il n’y a pas d’agriculture, pas de navigation, on n’utilise pas les marchandises importées par mer, il n’y a ni vastes bâtiments, ni engins servant à déplacer et déménager ce qui nécessite beaucoup de force ; il n’y a aucune connaissance de la surface terrestre, aucune mesure du temps, ni arts ni lettres, pas de société ; et, ce qui est pire que tout, il règne une peur permanente, un danger de mort violente. La vie humaine est solitaire, misérable, dangereuse, animale et brève. (…)

Tel est donc le misérable état du genre humain dans lequel il se trouve par nature ; il lui est pourtant possible d’en sortir, pour une part par les passions et, pour une autre part, par sa raison. »

Thomas HOBBES, Léviathan (1651), chapitre XIII : « De la condition du genre humain »

Méthodologie de la dissertation de philosophie

Méthodologie de la dissertation de philosophie (Résumé)

Méthodologie de la dissertation de philosophie
Méthodologie de la dissertation de philosophie

Cet article est un résumé des principales étapes de la méthodologie de la dissertation de philosophie. Vous pouvez également retrouver la méthode en vidéos ici.

Le travail au brouillon :

  1. Commencez par analyser le sujet.

Pour faire une bonne dissertation, il faut d’abord bien comprendre la question qui est posée. Commencez par analyser chaque terme du sujet : demandez-vous ce que signifient les mots employés, comment vous pourriez les définir, ce qu’ils évoquent, à quels concepts vous pouvez les associer et à quels aspects du cours ou à quels auteurs étudiés vous pouvez les rattacher.

Pour bien comprendre la question, essayer de la reformuler en n’oubliant aucun aspect important : cela vous permet de comprendre exactement ce qui est demandé afin de ne pas faire de hors-sujet ! C’est une des étapes les plus importantes de la méthodologie de la dissertation de philosophie.

  1. Trouver des idées.

Une fois que vous avez bien compris le sujet, il faut vous demander ce que vous pourriez répondre à cette question et surtout comment vous pourriez défendre vos réponses, c’est-à-dire les argumenter, les justifier. Mais, vous ne devez pas vous contenter d’une seule réponse : il faut que vous vous demandiez quelles objections on pourrait vous faire, comment on pourrait envisager les choses autrement, etc. Il s’agit de dialoguer avec vous-mêmes !

En fait, vous devez trouver quels arguments permettraient de défendre les deux réponses possibles (oui et non) : l’objectif est de comprendre la complexité de la question, autrement dit de saisir pourquoi elle pose un problème qui ne permet pas de donner une réponse unique et définitive. En d’autres termes, vous devez comprendre pourquoi elle suscite un débat !

Pour trouver des idées, il faut réfléchir ! Mais vous pouvez aussi vous référer au cours, aux auteurs étudiés, vous pouvez également analyser des exemples, des références littéraires ou cinématographiques, etc.

  1. Construire la problématique.

Une fois que vous avez trouvé suffisamment d’idées, vous devez essayer de formuler précisément le problème que soulève ce sujet. Une problématique, en philosophie, c’est ce qui permet de comprendre pourquoi on ne peut pas répondre de manière immédiate, unique et définitive à la question qui est posée. Si cela n’est pas possible, c’est parce que la question posée suscite un débat qui oblige à envisager plusieurs éléments de réponse pour comprendre la complexité de la réalité évoquée.

Pour construire la problématique, il faut suivre trois étapes :

Commencez par énoncer et expliquer brièvement la réponse la plus évidente que l’on pourrait donner à cette question. Cette réponse correspond  le plus souvent au sens commun : ce que l’on pense spontanément sans avoir réfléchi à la question.

Expliquer ensuite quelle objection on pourrait faire à cette première thèse : vous pouvez vous appuyer sur un exemple que vous analyserez brièvement. Cette objection permet de faire surgir la dimension problématique en montrant que la réponse n’est pas aussi simple et évidente que l’on pouvait le penser, parce qu’une difficulté surgit. Utilisez des définitions des termes du sujet.

Ensuite, vous présentez une nouvelle objection à la thèse précédente en vous appuyant sur des définitions et un exemple.

  1. Construire le plan.

Votre plan doit comporter obligatoirement trois parties : les deux premières correspondent aux deux premières étapes de votre problématique.

La première partie expose de manière détaillée la réponse la plus évidente, immédiate que l’on peut donner au sujet : cette réponse correspond  le plus souvent au sens commun. Il s’agira donc d’expliquer pourquoi on peut être amené à penser cela.

La deuxième partie expose les objections que l’on peut faire à cette thèse immédiate : cette deuxième partie est plus « philosophique » parce qu’elle présente un raisonnement plus approfondi.

La troisième partie approfondit encore le raisonnement en apportant une nouvelle idée : CE N’EST PAS une synthèse, c’est-à-dire un mélange des deux premières parties. Il s’agit de défendre la thèse avec des arguments plus forts qui résistent aux objections de la deuxième partie.

Par exemple : pour le sujet « peut-on forcer quelqu’un à être libre ? », la troisième partie explique pourquoi on peut dire, à la fois, que la liberté n’est pas compatible avec la contrainte (1ère partie), et que la contrainte est nécessaire pour que les hommes deviennent libres (2ème partie). La résolution de cette contradiction se trouve dans le concept d’autonomie. En effet, la vraie liberté consiste à être autonome, c’est-à-dire à être capable de se donner soi-même des règles, mais cette autonomie n’est pas innée : elle ne peut être développée que par l’intériorisation et la compréhension des contraintes. Autrement dit, l’homme ne peut devenir autonome qu’à partir du moment où il a d’abord été forcé à respecter des règles (rôle de l’éducation), règles qu’il est ensuite devenu capable de comprendre et de s’appliquer par lui-même grâce à sa raison.

Méthodologie de la dissertation de philosophie : La Rédaction

  1. L’introduction

L’introduction comporte deux parties :

Le premier paragraphe est la présentation détaillée de la problématique.

Le deuxième paragraphe est l’exposé rapide du plan que vous allez suivre : présentez rapidement l’idée principale de chaque partie.

  1. Le développement

Chaque partie doit commencer par l’annonce de l’idée principale que vous allez défendre dans cette partie, et elle doit se terminer par un rapide bilan de ce que vous avez montré dans cette partie. Par ailleurs, entre deux parties, vous devez faire suivre le bilan d’une transition qui doit faire apparaître une difficulté posée par l’idée que vous venez de défendre. Cette transition permet de montrer pourquoi il faut poursuivre la réflexion en envisageant une nouvelle réponse, ou une nouvelle idée. 

Chaque partie doit comporter plusieurs arguments donc plusieurs sous-partie : au minimum deux ! Ces arguments peuvent être de plusieurs nature, mais ils doivent tous être précisément et clairement expliqués. Ce peut être : l’analyse d’une définition, une idée personnelle, une idée exposée en cours, une thèse développée par un auteur, l’analyse d’un exemple, la référence à un livre ou un film, ou tout autre œuvre culturelle. 

Enfin, vous devez définir clairement chaque concept important que vous utilisez. La première partie doit contenir au moins la définition des termes importants du sujet, mais vous pouvez apporter de nouveaux concepts jusque dans la troisième partie : il faudra alors les définir.

  1. La conclusion

La conclusion comporte trois parties : 1. La reprise rapide de la question posée par le sujet et du problème qu’elle soulevait. 2. Le résumé de votre développement. 3. Une ouverture qui explique quelle nouvelle question votre raisonnement ouvre : il s’agit de montrer que la réflexion peut se poursuivre, éventuellement en faisant le lien avec une autre notion du programme.

J’espère que ce résumé de la méthodologie de la dissertation de philosophie vous aidera a bien commencé, vous trouverez encore davantage de conseils sur la page Méthode.

Citation de Nietzsche sur l’artiste

Cette citation de Nietzsche sur l'art

Cette citation de Nietzsche sur l’art est représentative de sa conception de l’artiste et du génie. Nietzsche s’oppose à la conception du génie de Kant, inspirée du romantisme. Il combat ici l’idée d’un génie qui parce qu’il est inspiré et que les idées lui viennent toutes seules, n’a pas besoin de travailler. Au contraire, pour lui, l’artiste ou le scientifique de génie est quelqu’un qui doit travailler beaucoup.

Selon lui, le génie n’est pas un homme « inspiré » c’est un homme comme les autres « dont la pensée est active dans une direction unique, qui utilisent tout comme matière première, qui ne cessent d’observer leur vie intérieure et celle d’autrui et qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens en vue d’une fin unique ».

Il prend la métaphore du bâtisseur. Le génie apprend d’abord à poser des pierres, il travaille, il bâtit et c’est en travaillant qu’il donne peu à peu forme à son œuvre.

Cette citation de Nietzsche peut être intéressante sur le sujet : « Peut-on parler d’un travail de l’artiste ? »

Texte de Nietzsche :

« Les artistes ont quelque intérêt à ce qu’on croie à leurs intuitions subites, à leurs prétendues inspirations ; comme si l’idée de l’œuvre d’art, du poème, la pensée fondamentale d’une philosophie tombaient du ciel tel un rayon de la grâce. En vérité, l’imagination du bon artiste, ou penseur, ne cesse pas de produire, du bon, du médiocre et du mauvais, mais son jugement, extrêmement aiguisé et exercé, rejette, choisit, combine ; on voit ainsi aujourd’hui, par les Carnets de Beethoven, qu’il a composé ses plus magnifiques mélodies petit à petit, les tirant pour ainsi dire d’esquisses multiples. Quant à celui qui est moins sévère dans son choix et s’en remet volontiers à sa mémoire reproductrice, il pourra le cas échéant devenir un grand improvisateur ; mais c’est un bas niveau que celui de l’improvisation artistique au regard de l’idée choisie avec peine et sérieux pour une œuvre. Tous les grands hommes étaient de grands travailleurs, infatigables quand il s’agissait d’inventer, mais aussi de rejeter, de trier, de remanier, d’arranger.

Si la faculté de produire s’est quelque temps suspendue et a été arrêtée dans son cours par un obstacle, elle fournit enfin un flot aussi subit que si une inspiration immédiate, sans travail intérieur préalable, autrement dit que si un miracle s’accomplissait. C’est ce qui produit l’illusion connue, au maintien de laquelle, comme j’ai dit, l’intérêt de tous les artistes est un peu trop attaché. Le capital n’a fait juste que s’accumuler, il n’est pas en une fois tombé du ciel. Il y a du reste encore autre part une telle inspiration apparente, par exemple dans le domaine de la bonté, de la vertu, du vice.»

Friedrich NIETZSCHE, Humain, trop humain (1880), §§ 155-156

Pour davantage de contenu sur la notion de l’art, consultez la page Cours de philosophie.

Platon : L’allégorie de la caverne

L’allégorie de la caverne est un des passages les plus connus de La République et sans doute un des écrits les plus connus de Platon. Il y est question de la condition humaine, de la Vérité et également de la vocation de la philosophie.

L’allégorie de la caverne représente la situation la plus commune des hommes, selon Platon, qui vivent dans l’illusion et n’ont que des opinions alors même qu’ils pourraient se tourner vers la connaissance. Ainsi, pour Platon, les hommes vivent communément comme s’ils étaient dans une caverne. Ils sont au fond pieds, bras et tête enchainés, ils sont contraints de regarder un mur sur lequel des ombres apparaissent. En effet, dans leurs dos, se trouvent un feu et des montreurs de marionnettes qui se déplacent devant le feu afin que les hommes puissent voir des ombres. Ces individus ne sont jamais sorti de la caverne et ne peuvent tourner la tête, ils prennent donc les ombres pour la réalité.

L’allégorie de la caverne : Quelle signification ?

Pour Platon, les hommes enchainés au fond de la caverne sont les hommes en général. Les ombres qu’ils voient passer représentent les illusions des hommes. Selon lui, les hommes se laissent tromper par leurs sens et ils restent dans le domaine de l’illusion et de l’opinion alors même qu’ils pourraient se tourner vers la vérité et acquérir une véritable connaissance des choses. Vous comprenez que dans cette allégorie, le soleil hors de la caverne représente la vérité. Par ailleurs, les montreurs de marionnettes sont les politiques ou les sophistes qui manipulent les hommes en les incitant à rester dans l’illusion.

Que se passe-t-il alors ?

Platon raconte que l’un des hommes réussit à se détacher et sort de la caverne. Là il est d’abord ébloui par la vérité, puis prenant conscience que tous vivent dans l’illusion sans saisir la réalité des choses, il entreprend de redescendre dans la caverne pour libérer les autres. C’est alors que les autres refusent de le croire, le traitent de fou et tentent même de le tuer. On voit communément ici une référence faite par Platon à son maître Socrate qui accusé de corrompre la jeunesse fût condamné à mort et but la ciguë. Vous trouvez un récit de cette épisode dans l’Apologie de Socrate. Tout comme Socrate dérange et finit par être tué car il veut désillusionner les hommes, le philosophe qui redescend dans la caverne est mal accueilli car il est difficile de remettre en question ce que l’on croit être vrai depuis toujours. Il est difficile d’admettre que nous vivons dans l’opinion et pourtant c’est une nécessité pour s’engager sur le chemin de la connaissance. Avant de prétendre chercher le savoir encore faut-il admettre que l’on ne sait pas. D’où cette phrase attribuée à Socrate « Je sais que je ne sais pas ».

Pour Platon, la seule manière pour les hommes de sortir de la caverne consiste à prendre conscience qu’ils vivent dans l’illusion puis à utiliser leur raison pour commencer à connaitre les choses telle qu’elles sont réellement et pas telle qu’elles apparaissent si l’on se fie aux sens ou aux opinions des autres. Mais l’allégorie de la caverne se termine sur une note pessimiste puisque le philosophe est menacé.

Texte de Platon, La République : L’allégorie de la caverne.

Représente-toi de la façon que voici l’état de notre nature relativement à l’instruction et à l’ignorance. Figure-toi des hommes dans une demeure souterraine, en forme de caverne, ayant sur toute sa largeur une entrée ouverte à la lumière. Ces hommes sont là depuis leur enfance, les jambes et le cou enchaînés, de sorte qu’ils ne peuvent bouger ni voir ailleurs que devant eux, la chaîne les empêchant de tourner la tête. La lumière leur vient d’un feu allumé sur une hauteur, au loin derrière eux. Entre le feu et les prisonniers passe une route élevée. Imagine que le long de cette route est construit un petit mur, pareil aux cloisons que les montreurs de marionnettes dressent devant eux, et au-dessus desquelles ils font voir leurs merveilles.

Je vois cela, dit-il

Figure-toi maintenant le long de ce petit mur des hommes portant des objets de toute sorte, qui dépassent le mur, et des statuettes d’hommes et d’animaux, en pierre, en bois et en toute espèce de matière. Naturellement, parmi ces porteurs, les uns parlent et les autres se taisent.

Voilà, s’écria-t-il, un étrange tableau et d’étranges prisonniers.

Ils nous ressemblent, répondis-je. Penses-tu que dans une telle situation ils n’aient jamais vu autre chose d’eux mêmes et de leurs voisins que les ombres projetées par le feu sur la paroi de la caverne qui leur fait face ?

Et comment ? observa-t-il, s’ils sont forcés de rester la tête immobile durant toute leur vie ?

Et pour les objets qui défilent n’en est-il pas de même ?

Sans contredit.

Si donc ils pouvaient s’entretenir ensemble ne penses-tu pas qu’ils prendraient pour des objets réels les ombres qu’ils verraient ?

Il y a nécessité.

Et si la paroi du fond de la prison avait un écho, chaque fois que l’un des porteurs parlerait, croiraient-ils entendre autre chose que l’ombre qui passerait devant eux ?

Non par Zeus, dit-il.

Assurément, repris-je, de tels hommes n’attribueront de réalité qu’aux ombres des objets fabriqués.

C’est de toute nécessité.

Considère maintenant ce qui leur arrivera naturellement si on les délivre de leurs chaînes et qu’on les guérisse de leur ignorance. Qu’on détache l’un de ces prisonniers, qu’on le force à se dresser immédiatement, à tourner le cou, à marcher, à lever les yeux vers la lumière : en faisant tous ces mouvements il souffrira, et l’éblouissement l’empêchera de distinguer ces objets dont tout à l’heure il voyait les ombres. Que crois-tu donc qu’il répondra si quelqu’un lui vient dire qu’il n’a vu jusqu’alors que de vains fantômes, mais qu’à présent, plus près de la réalité et tourné vers des objets plus réels, il voit plus juste ? si, enfin, en lui montrant chacune des choses qui passent, on l’oblige, à force de questions, à dire ce que c’est ? Ne penses-tu pas qu’il sera embarrassé, et que les ombres qu’il voyait tout à l’heure lui paraîtront plus vraies que les objets qu’on lui montre maintenant ?

Beaucoup plus vraies, reconnut-il.

Et si on le force à regarder la lumière elle-même, ses yeux n’en seront-ils pas blessés ? n’en fuira-t-il pas la vue pour retourner aux choses qu’il peut regarder, et ne croira-t-il pas que ces dernières sont réellement plus distinctes que celles qu’on lui montre ?

Assurément.

Et si, reprise-je, on l’arrache de sa caverne, par force, qu’on lui fasse gravir la montée rude et escarpée, et qu’on ne lâche pas avant de l’avoir traîné jusqu’à la lumière du soleil, ne souffrira-t-il pas vivement, et ne se plaindra-t-il pas de ces violences ? Et lorsqu’il sera parvenu à la lumière, pourra-t-il, les yeux tout éblouis par son éclat, distinguer une seule des choses que maintenant nous appelons vraies ?

Il ne le pourra pas, répondit-il; du moins dès l’abord.

Il aura, je pense, besoin d’habitude pour voir les objets de la région supérieure. D’abord ce seront les ombres qu’il distinguera le plus facilement, puis les images des hommes et des autres objets qui se reflètent dans les eaux, ensuite les objets eux-mêmes. Après cela, il pourra, affrontant la clarté des astres et de la lune, contempler plus facilement pendant la nuit les corps célestes et le ciel lui-même, que pendant le jour le soleil et sa lumière.

Sans doute.

A la fin, j’imagine, ce sera le soleil – non ses vaines images réfléchies dans les eaux ou en quelque autre endroit -mais le soleil lui-même à sa vraie place, qu’il pourra voir et contempler tel qu’il est.

Nécessairement, dit-il.

Après cela il en viendra à conclure au sujet du soleil, que c’est lui qui fait les saisons et les années, qui gouverne tout dans le monde visible, et qui, d’une certaine manière, est la cause de tout ce qu’il voyait avec ses compagnons dans la caverne.

Évidemment, c’est à cette conclusion qu’il arrivera.

Or donc, se souvenant de sa première demeure, de la sagesse que l’on y professe, et de ceux qui y furent ses compagnons de captivité, ne crois-tu pas qu’il se réjouira du changement et plaindra ces derniers ?

Si, certes.

Et s’ils se décernaient alors entre aux honneurs et louanges, s’ils avaient des récompenses pour celui qui saisissait de l’oeil le plus vif le passage des ombres, qui se rappelait le mieux celles qui avaient coutume de venir les premières ou les dernières, ou de marcher ensemble, et qui par là était le plus habile à deviner leur apparition, penses-tu que notre homme fût jaloux de ces distinctions, et qu’il portât envie à ceux qui, parmi les prisonniers, sont honorés et puissants ? Ou bien, comme le héros d’Homère, ne préférera-t-il pas mille fois n’être qu’un valet de charrue, au service d’un pauvre laboureur, et de souffrir tout au monde plutôt que de revenir à ses anciennes illusions et vivre comme il vivait ?

Je suis de ton avis, dit-il; il préférera tout souffrir plutôt que de vivre de cette façon là.

Imagine encore que cet homme redescende dans la caverne et aille s’asseoir à son ancienne place : n’aura-t-il pas les yeux aveuglés par les ténèbres en venant brusquement du plein soleil ?

Assurément si, dit-il.

Et s’il lui faut entrer de nouveau en compétition, pour juger ces ombres, avec les prisonniers qui n’ont point quitté leurs chaînes, dans le moment où sa vue est encore confuse et avant que ses yeux se soient remis (or l’accoutumance à l’obscurité demandera un temps assez long), n’apprêtera-t-il pas à rire à ses dépens, et ne diront-ils pas qu’étant allé là-haut il en est revenu avec la vue ruinée, de sorte que ce n’est même pas la peine d’essayer d’y monter ? Et si quelqu’un tente de les délier et de les conduire en haut, et qu’ils le puissent tenir en leurs mains et tuer, ne le tueront-ils pas ?

Sans aucun doute, répondit-il.

Maintenant, mon cher Glaucon, repris-je, il faut appliquer point par point cette image à ce que nous avons dit plus haut, comparer le monde que nous découvre la vue au séjour de la prison, et la lumière du feu qui l’éclaire à la puissance du soleil. Quant à la montée dans la région supérieure et à la contemplation de ses objets, si tu la considères comme l’ascension de l’âme vers le lieu intelligible, tu ne te tromperas pas sur ma pensée, puisque aussi bien tu désires la connaître. Dieu sait si elle est vraie. Pour moi, telle est mon opinion : dans le monde intelligible l’idée du bien est perçue la dernière et avec peine, mais on ne la peut percevoir sans conclure qu’elle est la cause de tout ce qu’il y a de croit et de beau en toutes choses; qu’elle a, dans le monde visible, engendré la lumière et le souverain de la lumière; que, dans le monde intelligible, c’est elle-même qui est souveraine et dispense la vérité et l’intelligence; et qu’il faut la voir pour se conduire avec sagesse dans la vie privée et dans la vie publique.

Platon, La république, Livre III, L’allégorie de la caverne.

Léon Bourgeois contre la méritocratie

Léon Bourgeois peut être considéré comme le chef de fil du mouvement solidariste qui prend forme en France à la fin du 19e siècle. Ces républicains et hommes politiques, cherchent alors à justifier un devoir de solidarité entre les membres d’une même société. Il s’agit de s’opposer au modèle libéral qui s’appuyant sur Darwin considère qu’il est tout à fait normal que les citoyens soient en concurrence et qu’il est très sain pour l’ensemble que s’y trouvent de fortes inégalités. Les solidarites dont Léon Bourgeois commence alors par rappeler que dans la nature la coopération et au moins aussi importante que la concurrence sinon plus importante. L’espèce humaine est une espèce qui prospère parce qu’elle a développé de grandes capacités de coopération, pas parce qu’elle est constamment en concurrence.

L’individu seul serait très faible

A partir de là, Léon Bourgeois met en évidence un autre point : un individu seul ne serait rien, il n’aurait aucune connaissance, aucun pouvoir, aucune science. Chaque individu de la société est donc d’emblée riche de tout ce que la société lui a permis d’avoir. Chaque enfant, aujourd’hui, en France bénéficie d’une éducation qui est possible parce qu’elle repose sur des siècles de connaissances, de recherches scientifiques et techniques, de culture etc … C’est pourquoi, il est possible de dire, selon lui, que chaque individu « naît débiteur de l’association humaine ». Cela signifie que chaque individu a d’emblée une dette envers la société dans laquelle il est né. Peut-on dire que nous avons tous la même dette ? Selon lui, certains ont davantage profité de l’association humaine, ils auront donc une dette plus importante que celui qui a hérité d’handicaps ou qui vient d’un milieu social défavorisé.

Contre l’idée d’un mérite individuel : il n’y a pas de méritocratie

Contrairement aux libéraux, les solidaristes vont donc critiqué l’idée que l’individu devrait sa réussite à ses efforts ou à son mérite uniquement. Ils s’opposent en cela à ce que l’on appelle aujourd’hui la méritocratie. Cela ne signifie pas qu’il n’est pour rien dans sa réussite, mais il doit admettre que la société, sa famille, son éducation, la culture dans laquelle il évolue sont pour beaucoup également dans sa réussite. Il est donc juste qu’il rende un peu de sa réussite à la société pour aider ceux qui ont moins profité des bienfaits de l’association humaine.

Cette thèse solidariste a notamment inspirée plus tard au XXe siècle, la sécurité sociale, le régime des retraites et l’idée d’un impôt sur les revenus. Toutes ces garanties et préceptes de justice sociale sont aujourd’hui menacés par l’idée de méritocratie qui voudrait à nouveau que les individus ne soient que le produit de leurs propres efforts.

Conseil de lecture :

On ne peut le considérer comme un penseur solidariste mais l’idée que la nature n’est pas simplement un lieu de concurrence est une idée très bien expliquée dans ce livre de Pablo Servigne : L’entraide : l’autre loi de la Jungle

méritocratie

Retrouvez d’autres articles sur le thème de la justice et de la liberté sur la page Cours de philosophie.

Exemple explication de texte

Exemple d’explication de texte en philosophie

Je vous montre ici un exemple d’explication de texte en philosophie. Vous trouverez dans l’ordre le texte à expliquer puis l’introduction et le début de l’explication linéaire. Je vous précise à chaque fois entre parenthèses à quel élément de la méthode de l’explication de texte ce passage correspond. Si vous ne l’avez pas fait, je vous conseille de lire les articles qui traitent de la méthode de l’explication de texte, vous pouvez les trouver sur cette page. Si vous préférez voir la méthode en vidéo c’est ici.

Texte de Pascal :

« Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l’arrêter comme trop prompt : si imprudents que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient : et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C’est que le présent, d’ordinaire, nous, blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu’il nous afflige et s’il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l’avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance, pour un temps où nous n’avons aucune assurance d’arriver. Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé et l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent ; et, si nous y pensons, ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Le présent n’est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. » 

Pascal, Pensées, Brunschvicg 172 / Lafuma 47.

Introduction de l’explication de texte

Dans ce texte de Pascal, extrait des Pensées, il est question du bonheur et de notre rapport au temps (Thème). L’auteur s’est demandé si notre tendance à nous tourner constamment vers le passé ou vers le futur n’était pas un obstacle au bonheur. Dans ce texte, Pascal montre que nous avons tendance à toujours nous tourner vers le futur (pour espérer) et vers le passé (pour regretter ce que nous avons fait ou ce que nous avons perdu) si bien que nous ne vivons jamais au présent, ce qui nous rend finalement malheureux. Ainsi du début du texte à la ligne 4, l’auteur énonce la première partie de sa thèse selon laquelle nous ne vivons pas au présent. Puis de « C’est que le présent » à « aucune assurance d’arriver », il formule un premier argument en faveur de sa thèse. Enfin de « Que chacun examine ses pensées » à la fin du texte, il formule un second argument puis énonce l’enjeu. Notre rapport au temps, nous rend malheureux.

Développement de l’explication de texte :

Dans ce texte, Pascal commence par énoncer la première partie de sa thèse, (étape du raisonnement), il nous dit “nous ne tenons jamais au temps présent” c’est-à-dire que l’homme ne vit pas le moment présent mais regarde le futur ou le passé (bonne paraphrase). Ici par temps, on peut entendre le temps objectif c’est-à-dire la durée qui est mesurée par l’horloge ou la montre de la même manière pour tous (définition). Le temps présent est le temps où nous sommes en train de vivre, car c’est en réalité le seul qui existe objectivement (définition). En effet, le passé n’existe plus et le futur n’existe pas encore si ce n’est dans notre esprit (définition). Ainsi, on peut observer que nombre de voyageurs passent beaucoup de temps à prendre des photos de leurs voyages au lieu de profiter des paysages directement. Ils semblent plus préoccupés par le fait de garder des souvenirs du passé plutôt que de vivre pleinement au présent (Exemple). Ensuite l’auteur remarque que nous considérons le futur avec espoir et nous voulons qu’il arrive plus vite. Il semble dire implicitement que nous ne sommes pas satisfaits du présent et que donc nous voulons que le futur arrive. Il remarque qu’ils veulent hâter le futur or il est impossible de faire venir le futur plus vite objectivement (justification). Et si l’on considère le temps subjectif c’est-à-dire le temps vécu et que nous percevons singulièrement, alors regarder le futur ne le fait pas passer plus vite, au contraire il faudrait s’amuser au présent et y vivre pleinement pour que le futur arrive plus vite (justification). De même, selon lui, nous avons tendance à vouloir retenir le passé car nous regrettons qu’il disparaisse, peut-être pensons que nous étions mieux dans le passé (Bonne paraphrase). Les nostalgiques ont ainsi ce regret du passé et ils ne sont pas très heureux au présent. Ainsi, dans Midnight in Paris de Woody Allen, le personnage principal déménage à Paris et il n’est pas heureux dans le présent car il considère le 19e siècle à Paris comme l’âge d’or de la culture humaine. Un événement fantastique a lieu et il se trouve conduit dans le passé et à cette époque il rencontre une femme qui, elle, est nostalgique de la Belle époque. Elle ne se trouve alors pas bien dans l’époque où elle est et qu’admire tant le personnage principal. (Exemple)

On voit donc que souvent les hommes ont tendance à ne pas se satisfaire de leur époque même si elle est de valeur et à vouloir le passé sans vivre dans le moment présent. L’auteur a donc montré que nous ne vivons pas bien au présent et espérons le futur ou regrettons le passé (étape du raisonnement).  Il remarque que de ce fait “nous errons dans des temps qui ne sont pas nôtres”. Il qualifie cela d’imprudent. Il veut dire par là que le présent est tout ce que l’on possède, c’est le seul temps dont nous pouvons disposer car le passé n’existe plus et le futur n’est pas encore (bonne paraphrase). Nous pourrions néanmoins dire qu’il est possible de faire nôtre le futur en essayant de l’influencer de manière indirecte en agissant sur le présent (Objection). Néanmoins, cette thèse semble avoir des limites car les personnes qui cherchent à contrôler le futur y arrivent rarement car le futur a de nombreuses causes autre que nous, nous ne pouvons pas être certain qu’un ou des événements imprévus ne vont pas venir déjouer nos plans. L’auteur a donc raison de nous dire imprudents car délaisser le présent est la meilleure manière d’être malheureux dans le présent et dans le futur.(Justification) Il nous dit ensuite que nous oublions le temps que nous pouvons contrôler mais pensons seulement à ceux qui n’existent pas. De ce fait, nous n’agissons pas sur le seul temps sur lequel nous avons une influence car nous ne pouvons influer que sur ce qui existe. (Bonne paraphrase) C’est une attitude irréfléchie car cela peut nous conduire à ne rien faire au présent si bien que nous n’obtiendrons rien dans le futur malgré nos espoirs.(Justification) Ainsi dans cette partie l’auteur a énoncé sa thèse et a montré que vivre dans le futur ou le passé était imprudents. Il va ensuite donner un argument pour soutenir sa thèse et montrer pourquoi nous avons tendance à fuir le présent. (étape du raisonnement)

A présent l’auteur va développer un argument pour justifier sa thèse principale (étape du raisonnement). Il dit “c’est que le présent d’ordinaire nous blesse”. En effet, selon lui, il est plus facile de s’imaginer un futur satisfaisant que de vivre le présent tel qu’il est, car l’imagination embellit souvent les choses rendant le présent plus difficile à vivre et terne (justification). L’imagination est cette faculté intellectuelle qui fabrique des images mentales à partir de nos expériences sensibles et grâce à laquelle nous pouvons souvent embellir le réel (définition). Nous avons tendance à ne pas vouloir voir notre présent car il nous fait souffrir ou nous déçoit donc nous préférons concentrer notre attention sur le futur qui pourrait être meilleur. Donc nous pourrions dire que penser au futur est une forme de distraction au sens où on cherche à ne pas penser au présent. (justification) Mais et si le présent est un présent heureux ? Car tous les moments présents ne peuvent pas être tous malheureux ? (Objection) Et bien là encore selon Pascal, les hommes gâchent leur bonheur présent car ils ont tendance à craindre de ne pas pouvoir reproduire leur bonheur dans le futur alors paradoxalement alors qu’ils sont heureux ils continuent de regarder le futur au lieu de se concentrer sur le présent. (justification)

J’espère que cet exemple d’explication de texte en philosophie, vous aura aidé à mieux comprendre ce que l’on attend de vous.