Explication de texte de philosophie

Comment réussir son explication de texte de philosophie : Podcast 2

Tout d’abord, je vous conseille si vous ne l’avez pas fait d’écouter le premier épisode où j’explique comment bien réussir son introduction. Le problème que rencontrent beaucoup d’étudiants quand ils font une explication de texte de philosophie est qu’ils ont tendance à seulement répéter le texte. Nous allons donc voir comment éviter cet écueil.

Afin de clarifier la méthode, je vais distinguer trois opérations principales que vous devez apprendre à faire pour bien réaliser votre explication de texte de philosophie. Ce sont trois opérations qui permettent d’expliquer véritablement.

L’étape de clarification du texte.

La première chose à faire est de montrer que vous avez compris le sens de la phrase ou de l’expression que vous expliquez. Cela signifie que si c’est une phrase un peu difficile à comprendre (comme cela peut être souvent le cas dans un texte de philosophie), vous avez le droit de faire de la bonne paraphrase, c’est-à-dire reformuler le passage de manière plus claire.

Une bonne manière de faire de la bonne paraphrase est de reformuler ce que dit l’auteur en définissant les termes importants qui apparaissent dans le passage.  Par exemple, si vous avez un texte qui commence ainsi : « La principale raison, selon moi, qui peut nous persuader que les bêtes sont privées de raison, est que »

Vous remarquez au passage que j’ai coupé la phrase. Vous pouvez et même souvent devez ne pas reformuler les phrases en entier quand elles sont trop longues, sans quoi cela ne clarifie rien. Dans le cas d’une phrase longue comme c’est le cas ici puisque Descartes fait une phrase de 11 lignes pour commencer, il faut reformuler des segments de phrases.

Une fois un segment découpé vous devez donc reformuler en définissant les termes importants, ici il faut évidemment définir le terme raison car c’est l’une des 17 notions centrales du programme.

Cela peut donner ceci : « dans ce début du texte, Descartes annonce qu’il va donner un argument en faveur de sa thèse selon laquelle les animaux n’ont pas la capacité d’ordonner leurs pensées de manière logique et d’émettre des jugements sur le bien et le mal ». Vous comprenez que j’ai reformulé la phrase en définissant le terme raison. La raison est la capacité d’ordonner ses pensées de manière logique et d’émettre des jugements sur le bien et le mal. Selon Descartes, les animaux sont privés de cette capacité.

Je vous conseille donc de reformuler les différents passages en définissant les termes important. C’est là bien évidement qu’il faut utiliser votre cours puisque vous avez vu dû y voir ces définitions. Toujours dans l’étape de clarification du texte vous pouvez parfois prendre un exemple pour illustrer ce que dit l’auteur. Ainsi vous montrez que vous avez bien compris ce dont il est question.

Deuxième opération à réaliser : mettre en évidence la structure du texte.

Quand vous expliquez un texte de philosophie, un des objectifs est de faire ressortir clairement ce que fait l’auteur, c’est-à-dire la manière dont il construit son argumentation afin de justifier la validité de sa thèse. Il est donc très important de préciser régulièrement à quel élément du texte nous avons affaire ici. Est-ce la thèse, un exemple, un premier argument, une objection, l’opinion commune ou sa réfutation ? Il s’agit essentiellement de montrer comment chaque élément du texte permet à l’auteur d’avancer dans l’argumentation de sa thèse.

Au passage vous pouvez remarquer que j’avais déjà fait cette opération dans l’exemple que j’ai pris juste avant, puisque je disais : « dans ce début du texte, Descartes annonce qu’il va donner un argument en faveur de sa thèse selon laquelle les animaux n’ont pas la capacité d’ordonner leurs pensées de manière logique et d’émettre des jugements sur le bien et le mal ».

Vous comprenez ici que vous pouvez faire ces différentes opérations simultanément.

Dernière opération pour réussir son explication de texte de philosophie : Justifier ce que dit l’auteur

Enfin dernière opération que vous devez réaliser pour bien expliquer. Je vais l’appeler la justification. Vous devez montrer pourquoi l’auteur affirme ce qu’il affirme, c’est-à-dire justifier, argumenter ses propos, montrer pourquoi il a raison de dire ce qu’il dit notamment à l’aide de connaissances acquises en cours.

Il s’agit donc en quelque sorte de prendre sa défense face à des objections éventuelles que l’on pourrait lui faire.  Vous pouvez même formuler une éventuelle objection et montrer comment l’auteur y répond déjà dans son texte.

Enoncer les objections que l’on pourrait lui faire nécessite que vous ayez en tête des éléments de votre cours et que vous connaissiez par exemple la thèse d’un auteur qui ne serait pas d’accord avec l’auteur du texte que vous avez à expliquer.

Trois étapes pour bien réussir son explication de texte de philosophie donc :

– clarifier le texte c’est à dire reformuler les passages du texte en définissant les termes importants et en prenant des exemples

– préciser la structure du texte c’est-à-dire ce que fait l’auteur aux différentes étapes du texte.

– et justifier les propos de l’auteur.

Comment vous organiser pour réussir cela concrètement ? Quelle méthode appliquer ?

Au brouillon normalement vous avez déjà commencé à identifier le thème et la thèse du texte en lisant le texte plusieurs fois. Je vous renvoie pour plus d’explication au premier épisode de ce podcast qui traite de la manière de bien commencer son explication de texte. Une erreur que font beaucoup d’étudiants est qu’ils s’arrêtent là et ne font pas davantage de travail au brouillon. Or c’est dommage car vous avez 4h pour faire votre explication et tout à fait le temps de faire un brouillon plus précis. Cela vous permettra de plus d’avoir sans doute une bien meilleure note.

Donc au brouillon, je vous conseille d’écrire également chaque morceau de phrase en essayant de le reformuler à côté, et en définissant les termes. Vous pouvez commencer par faire cela pour tout le texte en laissant un peu de place en dessous de chaque passage.  Ainsi quand vous avez fini une première reformulation de tout le texte, vous pouvez revenir au début pour préciser ce que fait l’auteur à ce moment là. Ce que j’ai appelé avant la mise en évidence de la structure du texte. (étape 2) Et vous pouvez également ajouter les idées que vous avez pour justifier ce que dit l’auteur. Ce que nous avons du dans l’étape 3.

Dernière remarque, parfois, et surtout si vous expliquez un tout petit passage comme une expression ou un bout de phrase, il ne va pas être pertinent de faire les trois opérations, mais seulement une ou deux.

Attention : vous devez toujours faire l’opération 1 c’est-à-dire reformuler en définissant les termes  Mais parfois l’auteur n’en aura pas assez dit pour que vous puissiez commencer à justifier ce qu’il dit. Donc vous pouvez ne pas faire l’étape de justification. Ou parfois il n’aura pas assez avancé dans son propos par rapport au passage précédent pour que vous puissiez dire qu’il a progressé dans son argumentation en énonçant un nouvel argument, un exemple, une objection etc

Ne vous inquiétez pas donc si vous ne faites pas toutes les opérations pour chaque passage, c’est déjà très bien si vous arrivez à en faire 2. L’important est que sur l’ensemble du texte, on puisse voir que vous reformulez en définissant, précisez la structure du texte et justifiez ce que dit l’auteur.

Schopenhauer : Faut-il rechercher le bonheur ?

Schopenhauer le bonheur ne peut être atteint.

Schopenhauer peut être considéré comme un philosophe plutôt pessimiste quant à notre capacité à être heureux. Paradoxalement, selon lui, c’est notamment parce que nous recherchons constamment le bonheur que nous ne l’atteignons jamais. En d’autres termes, le désir apparaît pour Schopenhauer comme un obstacle au bonheur. Nous allons voir ici ce qu’il répondrait au sujet « Faut-il rechercher le bonheur ? » qui est un sujet de dissertation classique. Pour en savoir plus sur la manière de bien réussir votre problématique et votre introduction de dissertation, c’est dans cet article.

Le désir nous rend constamment insatisfaits

Schopenhauer, inspiré en cela par le bouddhisme, considère que le désir est cause de souffrance et que désirer être heureux nous garantit de ne jamais l’être en réalité. Pourquoi cela ? Car tout désir est inquiétude et manque, si nous désirons quelque chose c’est que nous ne l’avons pas ou craignons de le perdre, alors le désir est souffrance. Selon Schopenhauer, « la vie oscille sans cesse de la souffrance à l’ennui ». Cela signifie que dans notre vie nous sommes constamment soit en train de désirer c’est-à-dire de souffrir pour Schopenhauer, soit en train de nous ennuyer car finalement nous avons tendance à être rapidement lassés de ce que nous avons finalement obtenu. Cet ennui laisse alors place à un nouveau désir qui nous fait souffrir jusqu’à ce qu’il soit satisfait et alors rapidement nous retombons dans l’ennui. C’est ce qu’il explique plus longuement dans le texte ci-dessous.

Texte de Schopenhauer sur le bonheur et le désir

« Tout vouloir procède d’un besoin, c’est-à-dire d’une privation, c’est-à-dire d’une souffrance. La satisfaction y met fin ; mais pour un désir qui est satisfait, dix au moins sont contrariés ; de plus le désir est long et ses exigences tendent à l’infini ; la satisfaction est courte et elle est parcimonieusement mesurée. Mais ce contentement suprême n’est lui-même qu’apparent ; le désir satisfait fait place aussitôt à un nouveau désir ; le premier est une déception reconnue, le second est une déception non encore reconnue. La satisfaction d’aucun souhait ne peut procurer de contentement durable et inaltérable. C’est comme l’aumône qu’on jette à un mendiant : elle lui sauve aujourd’hui la vie pour prolonger sa misère jusqu’à demain. – Tant que notre conscience est remplie par notre volonté, tant que nous sommes asservis à la pulsion du désir, aux espérances et aux craintes continuelles qu’il fait naître, tant que nous sommes sujets du vouloir, il n’y a pour nous ni bonheur durable, ni repos. Poursuivre ou fuir, craindre le malheur ou chercher la jouissance, c’est en réalité tout un ; l’inquiétude d’une volonté toujours exigeante, sous quelque forme qu’elle se manifeste, emplit et trouble sans cesse la conscience ; or sans repos le véritable bonheur est impossible. Ainsi le sujet du vouloir ressemble à Ixion attaché sur une roue qui ne cesse de tourner, aux Danaïdes qui puisent toujours pour emplir leur tonneau, à Tantale éternellement altéré ».

A.Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation(1818), trad.A.Burdeau, éd. PUF,1966, pp.252-253.

Alors faut-il désirer le bonheur ? Si notre désir est d’être heureux, alors nous allons nous dire que nous serons heureux quand nous aurons ce travail ou cette maison ou rencontré la bonne personne… Dans tous les cas, ne reportons le moment d’être heureux à plus tard quand nous aurons ceci ou cela et une fois que nous l’avons, nous n’en sommes plus satisfait et il nous faut encore autre chose pour être heureux. Si bien que finalement désirer le bonheur, espérer atteindre plus tard le bonheur, est un leurre qui nous garantit de ne jamais l’atteindre. Il faudrait sans doute mieux ce satisfaire de ce que nous avons et trouver des raisons d’être heureux aujourd’hui. Mais là encore c’est une chose difficile, selon Schopenhauer, car nous avons tendance à sentir beaucoup plus la douleur que le bonheur.

Nous ne sentons pas le bonheur quand nous l’avons atteint

Selon Schopenhauer, notre organisme est conçu pour sentir la douleur car elle est une alerte qui nous maintient en vie. En revanche, le bonheur passe rapidement inaperçu car il doit plutôt être défini négativement comme une absence de douleur. Cette absence nous ne la remarquons plus très rapidement. C’est pourquoi nous nous rendons souvent compte que nous étions heureux quand nous perdons ce bonheur. Alors la douleur que nous ressentons est d’autant plus grande que nous nous étions habitués à ce bonheur.

« Que notre vie était heureuse, c’est ce dont nous ne nous apercevons qu’au moment où ces jours heureux ont fait place à des jours malheureux. Autant les jouissances augmentent, autant diminue l’aptitude à les goûter : le plaisir devenu habitude n’est plus éprouvé comme tel. Mais par là même grandit la faculté de ressentir la souffrance ; car la disparition d’un plaisir habituel cause une impression douloureuse. Ainsi la possession accroit la mesure de nos besoins, et du même coup la capacité de ressentir la douleur. – Le cours des heures est d’autant plus rapide qu’elles sont agréables, d’autant plus lent qu’elles sont plus pénibles ; car le chagrin, et non le plaisir, est l’élément positif, dont la présence se fait remarquer. De même nous avons conscience du temps dans les moments d’ennui, non dans les instants agréables. Ces deux faits prouvent que la partie la plus heureuse de notre existence est celle où nous la sentons le moins. » SCHOPENHAUER

50 règles de Schopenhauer pour une vie moins pénible.

Schopenhauer considère que le bonheur n’est pas quelque chose que l’on peut atteindre et qu’il est donc vain de le rechercher. En revanche, il pense qu’il est possible de rendre sa vie moins pénible en suivant certaines règles qui nous garantissent de limiter les souffrances que nous infligeons aux autres et à nous-mêmes.

Ces carnets contenaient 50 règles, en voici quelques unes :

Il conseille dans la règle 2 d’éviter d’être jaloux et de susciter la jalousie. « Tu ne seras jamais heureux tant que tu seras torturé par un plus heureux. ». La jalousie est un poison qui nous rend toujours malheureux.

Schopenhauer conseille ensuite de faire ce que nous avons naturellement envie de faire. On ne peut pas longtemps forcer sa nature, mieux vaut se consacrer à un domaine dans lequel nous avons des facilités et un certain enthousiasme. « En effet, de même que les poissons ne sont bien que dans l’eau, l’oiseau seulement dans l’air, la taupe uniquement sous terre, ainsi chaque homme ne se sent bien que dans l’atmosphère appropriée pour lui. ». Règle 3.

Règle 6 : « Faire de bon cœur ce qu’on peut et souffrir de bon cœur ce qu’on doit. »

Règle 8 : « Limiter le cercle de ses relations : on offre ainsi moins de prise au malheur. »

Règle 48 : « Le bonheur appartient à ceux qui se suffisent à eux-mêmes. »

Citation de Blaise Pascal

Selon Pascal dans les Pensées, l’homme est à la fois misérable et grand. Misérable car physiquement il est très faible et peut être tué facilement par la nature, une catastrophe, une maladie. Mais l’homme est grand car il a conscience de lui-même. En d’autres termes, l’homme se sait fragile et mortel, il peut prendre conscience de sa place dans l’univers et réfléchir sur l’univers et sur son existence. Ce qui n’est pas toujours facile.

Texte de Pascal :

[Fragment 113-348] […] Par l’espace l’univers me comprend et m’engloutit comme un point : par la pensée je le comprends.

[Fragment 114-397] La grandeur de l’homme est grande en ce qu’il se connaît misérable ; un arbre ne se connaît pas misérable. C’est donc être misérable que de (se) connaître misérable, mais c’est être grand que de connaître qu’on est misérable.

[Fragment 200-347] L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature, mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser ; une vapeur, une goutte d’eau suffit pour le tuer. Mais quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, puisqu’il sait qu’il meurt et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien.

Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C’est de là qu’il nous faut relever et non de l’espace et de la durée, que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser, voilà le principe de la morale.

Pascal, Pensées et opuscules.

Citation de René Descartes

René Descartes souligne ici une des fonctions essentielles de la philosophie. La philosophie est la recherche de la sagesse et consiste donc à se défaire d’abord des préjugés, des illusions et des erreurs. Philosopher c’est chercher à savoir et il faut pour cela prendre d’abord conscience que l’on ne sait pas et douter de ses certitudes.
C’est pourquoi une des compétences du philosophe est de problématiser c’est-à-dire de voir des problèmes là où cela semble évident pour les autres. Vous trouvez davantage d’informations sur la problématisation dans cet article.

Texte de René Descartes :

« Or, c’est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre sans philosopher ; et le plaisir de voir toutes les choses que notre vue découvre n’est point comparable à la satisfaction que donne la connaissance de celles qu’on trouve par la philosophie ; et, enfin, cette étude est plus nécessaire pour régler nos moeurs et nous conduire en cette vie, que n’est l’usage de nos yeux pour guider nos pas. Les bêtes brutes, qui n’ont que leur corps à conserver, s’occupent continuellement à chercher de quoi le nourrir ; mais les hommes, dont la principale partie est l’esprit, devraient employer leurs principaux soins à la recherche de la sagesse, qui en est la vraie nourriture ; et je m’assure aussi qu’il y en a plusieurs qui n’y manqueraient pas, s’ils avaient espérance d’y réussir, et qu’ils sussent combien ils en sont capables. Il n’y a point d’âme tant soit peu noble qui demeure si fort attachée aux objets des sens qu’elle ne s’en détourne quelquefois pour souhaiter quelque autre plus grand bien, nonobstant qu’elle ignore * souvent en quoi il consiste. Ceux que la fortune * favorise le plus, qui ont abondance de santé, d’honneurs, de richesses, ne sont pas plus exempts de ce désir que les autres ; au contraire, je me persuade que ce sont eux qui soupirent avec le plus d’ardeur après un autre bien, plus souverain que tous ceux qu’ils possèdent. Or, ce souverain bien * considéré par la raison naturelle sans la lumière de la foi, n’est autre chose que la connaissance de la vérité par ses premières causes, c’est-à-dire la sagesse, dont la philosophie est l’étude. Et, parce que toutes ces choses sont entièrement vraies, elles ne seraient pas difficiles à persuader si elles étaient bien déduites. »

DESCARTES
Principes de la philosophie, lettre-préface

Comment bien commencer son explication de texte philosophique

Podcast 1 : Comment bien commencer son explication de texte philosophique

Le texte dont je parle à la fin et l’introduction de cette explication de texte philosophique.

« Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l’arrêter comme trop prompt : si imprudents que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient : et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C’est que le présent, d’ordinaire, nous, blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu’il nous afflige et s’il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l’avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance, pour un temps où nous n’avons aucune assurance d’arriver. Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé et l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent ; et, si nous y pensons, ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Le présent n’est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. » Pascal, Pensées, Brunschvicg 172 / Lafuma 47.

Exemple d’introduction d’explication de texte philosophique, pour plus de clarté je précise les différents éléments de l’introduction entre parenthèses avant :

(Présentation du texte) Dans ce texte de Pascal, extrait des Pensées, il est question de (thème du texte, ici deux notions) notre rapport au temps et des effets de ce rapport au temps sur notre bonheur. (Formulation du problème auquel le texte répond sous forme d’alternative) Pascal s’est demandé si la tendance des hommes à se focaliser le plus souvent sur le passé et sur le futur les rend plutôt heureux ou plutôt malheureux. (Formulation de la thèse c’est-à-dire de la réponse que fait l’auteur au problème dans ce texte) Dans ce texte, Pascal défend l’idée selon laquelle nous avons tendance à toujours nous tourner vers le futur (pour espérer) et vers le passé (pour regretter ce que nous avons fait ou ce que nous avons perdu) et ainsi à ne jamais vivre pleinement au présent ce qui nous rend finalement malheureux. (Formulation du plan du texte en insistant sur ce que fait l’auteur dans ce passage d’un point de vue argumentatif) Dans la première partie du texte des lignes 1 à 6, l’auteur énonce sa thèse selon laquelle les hommes ont tendance à ne pas s’intéresser au présent mais uniquement au futur et au passé. Puis dans une deuxième partie des lignes 6 à 10, il donne de raisons qui selon lui justifient que les hommes se détournent du présent. Enfin des lignes 10 à la fin, il donne d’abord un argument de fait pour justifier sa thèse puis il énonce la deuxième partie de sa thèse selon laquelle cette tendance que nous avons à nous détourner du présent nous rend malheureux.

Pour plus d’informations sur l’explication de texte, je vous invite à regarder les articles sur l’explication de texte ici.

Sénèque citations sur l’existence

Sénèque citations sur l’existence

« Il n’est pas vrai que nous ayons peu de temps, mais nous en avons déjà beaucoup perdu. La vie est assez longue, et elle serait bien suffisante pour l’accomplissement de nos principales fonctions, si, dans son ensemble, elle était organisée comme il faut. » De la Brièveté de la vie

De la Brièveté de la vie :

« Nous n’avons pas reçu une vie brève, nous l’avons faite telle ». De la Brièveté de la vie

Sénèque dans cette oeuvre prend le contre pied de l’opinion commune selon laquelle la vie des hommes serait courte. A ses yeux, elle n’est pas réellement courte et cela n’a de toute façon pas de sens de s’en plaindre. En revanche, les hommes rendent leur vie courte en usant mal de leur temps et en se laissant distraire par des occupations sans intérêts.

« Il n’est pas vrai que nous ayons peu de temps, mais nous en avons déjà beaucoup perdu. La vie est assez longue, et elle serait bien suffisante pour l’accomplissement de nos principales fonctions, si, dans son ensemble, elle était organisée comme il faut. » De la Brièveté de la vie

Pour Sénèque, les hommes perdent leur temps trop souvent soit en passant leur temps en boisson, nourriture, excès de toutes sortes, soit en s’inquiétant trop du regard des autres, de leur réputation, soit en papillonnant d’une idée à l’autre sans se fixer sur une seule. Il y a finalement à ses yeux de très nombreuses façons de perdre son temps et il n’y a qu’en réfléchissant précisément à ce que nous voulons réaliser et en ayant conscience que notre temps n’est pas illimité que nous pouvons faire que notre vie soit longue parce que bien employé.

« On ne trouve personne qui veuille partager son argent ; entre combien de gens partage-t-on sa vie ! On est parcimonieux s’il s’agit de garder intact son patrimoine ; mais quand il s’agit de perdre son temps, on est prodigue dans le seul domaine où l’avarice serait honorable. » De la Brièveté de la vie

Sénèque remarque très souvent que les hommes ont tendance à ne pas avoir conscience du caractère précieux du temps. Le temps est la seule chose qu’on ne peut rendre, nous devrions avoir beaucoup plus conscience de sa valeur et moins le gaspiller selon lui.

« Remémore-toi combien de fois tu as été ferme dans tes desseins, combien de journées se sont passées comme tu l’avais décidé, quand tu as disposé de toi-même, quand tu as eu le visage sans passion et l’âme sans crainte, ce qui a été ton oeuvre dans une existence si longue, combien de gens se sont arraché ta vie, sans que tu t’aperçoives de ce que tu perdais, combien de ta vie t’ont dérobé une douleur futile, une joie sotte, un désir avide, un entretien flatteur, combien peu t’est resté de ce qui est tien : et tu comprendras que tu meurs prématurément. »De la Brièveté de la vie

Je vous en dis plus sur De la Brièveté de la vie de Sénèque dans cet article.

Sénèque citations extraites des Lettres à Lucilius :

« Réfléchis bien, demande Sénèque, et tu verras que la majeure partie de l’existence se passe à mal faire, une grande part à ne rien faire, et la totalité à faire tout autre chose que ce qu’il faudrait. » Lettres à Lucilius I

« La fréquentation du monde et de la foule est à bannir ». Lettre 7

« Le dieu nous accorde un lendemain, soyons heureux de le recevoir. On jouit pleinement et avec sécurité de soi-même lorsqu’on attend le lendemain sans inquiétude. Qui, le soir, dit : « J’ai vécu », peut dire le matin : « Je gagne une journée. » Lettre 12

Ici encore, Sénèque considère qu’une manière d’être serein consiste à bien user de son temps de telle manière que l’on puisse dire après chaque journée que nous sommes satisfaits de cette journée. Il considère que les hommes ont trop tendance à voir la mort comme quelque chose de lointain quand ils sont jeunes, mais la mort peut advenir à tout âge.

« Disposons donc chacune de nos journées comme si elle fermait la marche, comme si elle achevait et complétait notre vie ». Lettre 12

« Ce n’est pas de vivre qui est désirable, c’est de vivre bien. Aussi le sage vit autant qu’il le doit, non autant qu’il le peut ». Lettre 70

Sénèque consacre une lettre à la question du suicide. Lui qui nous incite à bien vivre en ne perdant pas notre temps et en le consacrant à projets réfléchis et notamment à la philosophie, il n’est pas question de vivre pour lui en ayant perdu la possibilité de bien vivre. Mieux vaut mettre un terme à cette vie.

« Bien mourir, c’est nous soustraire au danger de mal vivre. » Lettre 70

« Pour un seul moyen d’entrer dans la vie, il y en a mille d’en sortir. […] Le grand motif pour ne pas nous plaindre de la vie, c’est qu’elle ne retient personne. » Lettre 70

« Qui ne sait pas vers quel port il doit tendre n’a pas de vent qui lui soit bon ». Lettre 71

Sénèque pointe ici l’importance de savoir ce que l’on veut faire de nos journées et de notre vie, car celui qui ne sait pas où il veut aller, et ce qu’il veut faire sera toujours conduit par les circonstances et les autres. Ce faisant, il ne peut bien vivre c’est pourquoi le vent ne peut jamais lui être bon s’il n’a pas déterminé rationnellement ce à quoi il veut consacrer sa vie.

« Ceux qui convoitent ou méprisent les choses selon qu’elles s’achètent plus ou moins cher, dédaignent la lumière qui ne coûte rien ». Lettre 122

De la colère :

Sénèque citations sur la colère.

« Qui ne ressent pas la colère demeure inébranlable à l’injure.» Sénèque ; De la colère, III

Sénèque en bon stoïcien, voit la colère comme une passion qui nous affecte et nous fait perdre le contrôle. Il faut donc s’en défaire. Se mettre en colère c’est réagir à l’injure ou à l’action d’un autre et le laisser prendre le contrôle de notre esprit et de notre état émotionnel. En ce sens, se mettre en colère c’est perdre le contrôle de soi-même et donc perdre sa liberté. Les autres n’ont pas de prises sur nous si leurs injures ne peuvent nous mettre en colère.

« L’injure est moins dans la manière dont elle est faite que dans celle dont elle est reçue.» Sénèque ; De la colère, III

« Celui qui s’enquiert de tout ce qui s’est dit sur son compte, et qui va exhumant les propos les plus secrets de l’envie, trouble lui-même son repos.» Sénèque ; De la colère, III, 5

« La colère abîme tout, il n’est guère de gens a qui elle n’ait coûté cher.» Sénèque ; De la colère, III, 5

Citation d’Hannah Arendt

Hannah Arendt suit en 1961 le procès de l’ancien dignitaire nazi Adolf Eichmann, responsable logistique de la « Solution Finale ». Elle écrit alors qu’Eichmann n’est pas un monstre ce qui fait scandale et parle de « banalité du mal ». Eichmann n’est pas un génie du mal, selon elle, simplement il ne pense pas. Il s’en remet à ses supérieurs et se contente de bien faire son travail.

Texte de Hannah Arendt :

« Tout a commencé quand j’ai assisté au procès Eichmann à Jérusalem. Dans mon rapport, je parle de la « banalité du mal ». Le mal, on l’apprend aux enfants, relève du démon ; il s’incarne en Satan (qui « tombe du ciel comme un éclair » (saint Luc, 10,18), ou Lucifer, l’ange déchu dont le péché est l’orgueil (« orgueilleux comme Lucifer »), cette superbia dont seuls les meilleurs sont capables : ils ne veulent pas servir Dieu ils veulent être comme Lui.  […] Cependant, ce que j’avais sous les yeux, bien que totalement différent, était un fait indéniable. Ce qui me frappait chez le coupable, c’était un manque de profondeur évident, et tel qu’on ne pouvait faire remonter le mal incontestable qui organisait ses actes jusqu’au niveau plus profond des racines ou des motifs. Les actes étaient monstrueux, mais le responsable – tout au moins le responsable hautement efficace qu’on jugeait alors – était tout à fait ordinaire, comme tout le monde, ni démoniaque ni monstrueux. Il n’y avait en lui trace ni de convictions idéologiques solides, ni de motivations spécifiquement malignes, et la seule caractéristique notable qu’on décelait dans sa conduite, passée ou bien manifeste au cours du procès et au long des interrogatoires qui l’avaient précédé, était de nature entièrement négative : ce n’était pas de la stupidité, mais un manque de pensée. Dans le cadre du tribunal israélien et de la procédure carcérale, il se comportait aussi bien qu’il l’avait fait sous le régime nazi mais, en présence de situations où manquait ce genre de routine, il était désemparé, et son langage bourré de clichés produisait à la barre, comme visiblement autrefois, pendant sa carrière officielle, une sorte de comédie macabre. Clichés, phrases toute faites, codes d’expression standardisés et conventionnels ont pour fonction reconnue, socialement, de protéger de la réalité, c’est-à-dire des sollicitations que faits et événements imposent à l’attention, de par leur existence même. On serait vite épuisé à céder sans cesse à ces sollicitations ; la seule différence entre Eichmann et le reste de l’humanité est que, de toute évidence, il les ignorait totalement. »

Hannah Arendt, La Vie de l’esprit, p.20-21

Sénèque : De la brièveté de la vie

Il s'agit d'une oeuvre de Sénèque sur la manière de se réapproprier le temps qui semble nous échapper et sur le sens que l'on donne à sa vie.

Sénèque est un philosophe latin né en -4 av. J-C et mort en 65 ap. J-C. Il appartient à l’école stoïcienne fondée par Zénon de Citium. Il a écrit notamment Des Bienfaits, De la brièveté de la vie, De la clémence, Lettres à Lucilius, De la tranquillité de l’âme et De la vie heureuse.

De la Brièveté de la vie date de 49 ap. J-C environ. Sénèque écrit alors au préfet Paulinus. Il s’agit d’une oeuvre sur la manière de se réapproprier le temps qui semble nous échapper et sur le sens que l’on donne à sa vie.

Le titre peut laisser penser que Sénèque énonce une évidence : la vie est brève. Mais c’est précisément le contraire que va défendre Sénèque. « Nous n’avons point reçu une vie brève, nous l’avons faite telle » dit-il. Pour lui, notre vie est brève ou non en fonction de la manière dont nous vivons. Soit nous arrivons à maitriser le temps que nous avons et alors ce temps est suffisant, soit nous ne le maitrisons pas et alors notre vie nous semble effectivement brève. L’enjeu est donc de savoir ce que nous faisons de notre temps. Sénèque critique notamment la manière de vivre des « gens occupés » qui dilapident leur temps et s’activent sans cesse sans réelle raison, tout en ignorant que leur temps est compté. Pour ces personnes là, la vie est effectivement brève, mais c’est parce qu’ils perdent beaucoup de leur temps.

Deux erreurs humaines

Sénèque commence par regretter deux erreurs humaines très courantes. D’abord les hommes ont tendance à considérer que la nature leur donne une vie trop courte. Pour Sénèque c’est une folie de se plaindre d’avoir reçu trop peu de temps et d’accabler l’injuste nature car ce temps que la nature nous donne ne dépend pas de nous. Il est donc vain de vouloir changer cela et de s’en plaindre. Pour les stoïciens, il est inutile de vouloir que les choses arrivent comme nous le désirons, dans les domaines où cela ne dépend pas de nous, il faut vouloir ce qui arrive.

Sénèque relève ensuite une deuxième erreur. Les hommes se plaignent d’avoir reçu une vie courte mais, en réalité, ils vivent comme s’ils étaient immortels, c’est-à-dire qu’ils dilapident leur temps comme s’il n’était pas précieux. Il va alors énumérer les façons diverses dont les hommes peuvent perdre leur temps, cela va de celui qui perd son temps en s’abrutissant par l’alcool ou la nourriture, à celui qui uniquement soucieux du regard des autres cherche à réussir à leurs yeux à tous prix sans réaliser quoi que ce soit de vraiment important pour lui-même. Perdre son temps pour Sénèque, cela peut donc être par exemple, s’inquiéter constamment de sa beauté ou de celle des autres, chose qui de toute façon ne dure pas, ou encore éparpiller ses actions dans différents projets sans jamais se fixer sur un et l’amener à terme.

Vivre et non simplement exister

Comment alors bien vivre ? Pour Sénèque mener une vie véritable consiste à entreprendre des actions qui ne sont pas gratuites et irréfléchies, mais au contraire réfléchies et conscientes. Des actions que nous avons donc réellement choisies et qui sont maîtrisées. C’est ainsi que l’homme peut réellement vivre au lieu de simplement « passer du temps ». La métaphore du bateau qui se laisse emporter est ici éclairante. Si ce bateau sans direction se laisse emporter et tourne sans cesse en rond, pourra-t-on dire qu’il a beaucoup navigué ? On pourrait dire qu’il a navigué longtemps, mais pas beaucoup navigué car il n’est arrivé nul part.

De même, pour Sénèque, un individu qui n’a pas de projet précis, vagabonde sans cesse ou perd son temps est peut-être âgé, mais, pour autant, on ne peut pas dire qu’il a beaucoup vécu. Seul celui qui utilise son temps intelligemment a beaucoup vécu.

Par ailleurs, cette métaphore illustre bien aussi le côté néfaste des passions qui nous détournent de nos projets réfléchis : plus il y a eu de vent, moins le bateau a pu accomplir sa fonction, sa mission. Il importe donc de retenir la distinction de cet ouvrage entre vie et existence, entre vivre et passer du temps. « Rien n’est moins le fait d’un homme occupé que de vivre » car si ce à quoi il s’occupe, il ne l’a pas réellement choisi de manière éclairé alors en réalité il s’agite et perd son temps.

Autre philosophe stoïcien très célèbre : Epictète dont vous pouvez trouver une idée maîtresse ici.

Citation Alexis de Tocqueville

Le nouveau despotisme que redoute Alexis de Tocqueville n’est pas le despotisme tel que Montesquieu le définissait. Il ne s’agit pas d’un pouvoir arbitraire faisant régner l’ordre par la crainte et la violence, mais d’un pouvoir absolu et doux. Le despotisme que doivent craindre les démocraties est celui d’un Etat qui petit à petit, profitant du désintérêt des citoyens pour la vie politique et de leur penchant à centraliser le pouvoir, étendrait son administration de manière à contrôler absolument tout.

Texte de Tocqueville :

« Lorsque le goût des jouissances matérielles se développe chez un peuple plus rapidement que les lumières et que les habitudes de la liberté, il vient un moment où les hommes sont emportés et comme hors d’eux-mêmes, à la vue de ces biens nouveaux qu’ils sont prêts à saisir. Préoccupés du seul soin de faire fortune, ils n’aperçoivent plus le lien étroit qui unit la fortune particulière de chacun d’eux à la prospérité de tous. Il n’est pas besoin d’arracher à de tels citoyens les droits qu’ils possèdent; ils les laissent volontiers échapper eux-mêmes. L’exercice de leurs devoirs politiques leur paraît un contretemps fâcheux qui les distrait de leur industrie. S’agit-il de choisir leurs représentants, de prêter main-forte à l’autorité, de traiter en commun la chose commune, le temps leur manque; ils ne sauraient dissiper ce temps si précieux en travaux inutiles. » De la démocratie en Amérique.

Plus de détails sur Alexis de Tocqueville dans cet article.

Qu’est-ce que la philosophie ?

Qu'est-ce que la philosophie ? Que vous soyez amenés à faire de la philosophie au lycée ou juste curieux, cette question vous a sans doute effleurée l'esprit. Afin que vous sachiez un peu à quoi vous attendre je vais tenter de clarifier ce qu'est la philosophie.

Qu’est-ce que la philosophie ? Que vous soyez amenés à faire de la philosophie au lycée ou juste curieux, cette question vous a sans doute effleurée l’esprit. Afin que vous sachiez un peu à quoi vous attendre je vais tenter de clarifier ce qu’est la philosophie.

Souvent les élèves confrontés à la philosophie en terminale, ont des présupposés sur la philosophie. Il s’agirait d’une matière plutôt ennuyeuse pratiquée par des gens un peu « perchés » et dont on se demande à quoi elle sert. On sous-entend alors souvent qu’elle pourrait bien ne servir à rien ! Alors qu’est-ce que la philosophie ? Et à quoi sert-elle ?

Des conceptions différentes selon les philosophes

Définir précisément la philosophie est une entreprise complexe car ceux qui la pratiquent en ont souvent donné des définitions différentes et ont chacun leur conception de la philosophie. Voici quelques exemples :

Aristote : “C’est à bon droit que la philosophie est appelée science de la vérité” Métaphysique

Epicure : “La philosophie n’est pas une science pure et théorique, c’est une règle pratique d’action; bien plus, elle est elle-même une action, une énergie qui procure, par des discours et des raisonnements, la vie bienheureuse” Maximes

Marc-Aurèle : “La philosophie consiste à garder ses démons intérieur  à l’abri des outrages, innocent, supérieur aux plaisirs et aux peines, ne laissant rien au hasard et surtout attendant une mort propice à la pensée” Pensées pour moi-même

Pascal : “Se moquer de la philosophie, c’est vraiment philosopher” Pensées

Descartes : “Ce mot de philosophie signifie l’étude de la sagesse et par la sagesse on entend une parfaite connaissance de toutes les choses que l’homme peut savoir, tant pour la conduite de sa vie que pour la conservation de sa santé et l’invention de tous les arts” Discours de la Méthode

Descartes : “Toute la philosophie est comme un arbre, dont les racines sont la métaphysique, le tronc est la physique, et les branches qui en sortent sont toutes les autres sciences, la médecine, la mécanique et la morale” Discours de la méthode

Kant : “La philosophie est un système de connaissance rationnelle à partir de concepts” Métaphysique des Moeurs

Schopenhauer : “La philosophie naît de notre étonnement au sujet du monde et de notre existence” Le Monde comme Volonté et comme représentation

Une première définition par l’étymologie

Le mot philosophie a une origine grec. Si on décompose le terme, philo vient du verbe philein : aimer, rechercher et sophia signifie la sagesse. La philosophie serait donc l’amour ou la recherche de la sagesse. Mais qu’est-ce que la sagesse ? Que faut-il mettre derrière cette recherche de la sagesse ? S’il est difficile de donner un définition qui vaudrait pour tous les philosophes on peut néanmoins mettre en évidence un point commun. Faire de la philosophie c’est se poser des questions sur le monde et essayer d’y répondre en utilisant sa raison.

Socrate au 5e siècle av J-C pratiquait ainsi la philosophie en posant des questions à ses interlocuteurs. Son but était alors de les pousser à remettre en question leurs opinions et préjugés, il cherchait à les faire douter, afin qu’ils commencent à chercher effectivement la vérité. Vous trouverez davantage de précisions sur la vie et démarche de Socrate dans cet article.

Cette démarche de Socrate peut être considérée comme emblématique. Les philosophes posent des questions d’ordre général dans tous les domaines et essaient ensuite d’y répondre par des arguments, en donnant des preuves ou en utilisant la logique. Sur l’argumentation en philosophie, vous pouvez consulter cet article. En ce sens, ils cherchent à élaborer des connaissances. Mais alors quelle différence faire entre la philosophie et les sciences ?

Qu’est-ce que la philosophie aujourd’hui ?

On peut d’abord remarquer que si certaines questions sont devenues spécifiquement l’affaire des sciences telles que la physique, la biologie, les mathématiques, il reste de nombreux domaines qui ne font pas l’objet d’une science au sens strict et sont l’affaire de la philosophie. Il s’agit par exemple de la philosophie morale, de la philosophie politique ou encore de la philosophie de l’esprit.

De nombreuses questions sont posées par la philosophie qui ne peuvent être réglées par un protocole scientifique. Ce sont d’anciennes questions, comme la question de savoir si les hommes sont libres, ou s’il faut avoir peur de la mort, mais de nouvelles questions apparaissent avec l’essor des technologies et l’évolution de la société. La philosophie va donc poser, par exemple, la question du respect que l’on doit ou non aux animaux et à la nature, ou va encore se demander si nous devons avoir peur du développement des intelligences artificielles.

L’origine de la science et l’épistémologie

Enfin,s’il faut effectivement distinguer la philosophie des sciences dans la mesure où la philosophie ne suit pas une méthode expérimentale particulière pour arriver à une vérité, il est intéressant de remarquer que la philosophie est à l’origine des sciences et que de grands philosophes étaient également des biologistes, des mathématiciens, des physiciens. Les domaines que l’on rattache aujourd’hui aux sciences étaient autrefois des parties de la philosophie et ne s’en sont séparés que parce qu’elles se sont précisées et ont élaboré des méthodes spécifiques.

Par ailleurs, la philosophie réfléchit encore sur les sciences, c’est ce que l’on appelle l’épistémologie. La question n’est alors pas de prouver telle ou telle hypothèse en biologie ou en physique, mais de réfléchir, par exemple, sur le rapport de la théorie scientifique avec la réalité ou sur ce qui fait qu’une science est une science.

Qu’est-ce que la philosophie ? est donc une question relativement complexe, mais si l’on peut tenter une définition, il s’agit d’une activité qui à partir d’un questionnement cherche à élaborer des connaissances en s’appuyant sur la raison dans des domaines où il ne peut pas être fait de démonstrations scientifiques.

Pour aller un peu plus loin en vidéo :